Gouverner c’est prévoir

Un des inventeurs présumés de la formule, Émile de Girardin, ajoutait même que ne rien prévoir, c’était courir à sa perte. Et rien n’est plus difficile à prévoir que l’avenir, qu’il soit proche ou plus lointain. Olivier Véran, porte-parole du gouvernement, en a refait l’amère expérience en prétendant qu’il n’y avait pas de pénurie d’essence quand les files d’attente aux stations-service commençaient déjà à s’allonger dangereusement. Il faut dire que l’ancien ministre de la Santé bénéficiait d’une solide expérience après sa gestion du Covid et l’affirmation, contre toute évidence, que nous ne manquions ni de masques, ni de lits de réanimation, ni de tests, ni de vaccins, ni de personnel, et en tout cas que lui ne manquait pas d’air.

Poutine : le baroud d’horreur ?

Le président russe l’a annoncé lui-même. Il ne pouvait pas laisser sans réponse la destruction partielle de « son pont » reliant directement la Crimée annexée illégalement et la Russie, acheminant une grande partie des forces d’invasion vers le sud de l’Ukraine et en assurant l’intendance. La riposte a donc été de déverser un déluge de bombes et de missiles sur les grandes villes, en prétextant la destruction d’infrastructures militaires, alors que la cible réelle est la population civile et l’opinion intérieure russe. Les uns pour tenter de les terroriser et de briser leur moral, les autres pour les convaincre que le chef est toujours à la manœuvre et qu’il a la situation bien en main.

Dialogue social de sourds

Selon Élisabeth Borne, qui clamait encore dimanche dernier depuis l’Algérie où elle était allée conclure des accords commerciaux, que la situation de l’approvisionnement des stations-service allait se résorber rapidement, il est désormais nécessaire de réquisitionner les salariés grévistes pour les obliger à remettre en route les raffineries et les dépôts de carburant. Après avoir abandonné la méthode Coué, elle a donc opté pour la manière forte, au motif qu’« un désaccord salarial ne justifie pas de bloquer le pays ». Fort bien. Et au nom de quoi ce seraient les salariés qui devraient renoncer à leurs revendications, que la plupart des Français trouvent justifiées, pour arrondir encore le pécule distribué aux actionnaires ?

C’est celui qui dit qui y est

Ce serait pitoyable si ce n’était dramatique. Après la destruction partielle du pont qui relie la péninsule de Crimée annexée unilatéralement par la Russie depuis 2014, qualifiée d’acte terroriste et attribuée aux services secrets ukrainiens, Vladimir Poutine a essayé de sauver la face avec un double langage que seuls ses partisans accepteront de croire. Il a tenté à la fois de minimiser ce camouflet sévère, qui aura des conséquences sur l’approvisionnement en armes et en fournitures de l’armée d’occupation, en prétendant que les réparations seraient rapides, dans une sorte de « même pas mal » digne de la cour de récréation, et en essayant de riposter en infligeant de gros dégâts à l’Ukraine.