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Le complexe de Pinocchio
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 13 février 2025 11:11
- Écrit par Claude Séné
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François Bayrou aura beau nier farouchement et en bloc avoir eu connaissance des violences commises dans l’établissement catholique Bétharram où ont été scolarisés ses propres enfants, à l’époque où il exerçait les fonctions de ministre de l’Éducation nationale, il lui sera difficile, sinon impossible de prouver qu’il n’a été informé de rien. Comme parent d’élève, il aurait simplement entendu des rumeurs sur « des claques à l’internat ». Une méthode qu’il a pratiquée lui-même quand il punissait un enfant publiquement pour avoir essayé de « lui faire les poches ». Il affirme n’avoir jamais été informé de quoi que soit, alors que des témoignages affirment le contraire.
C’est donc parole contre parole. Le Premier ministre, usant de sa place d’autorité, défie ses détracteurs de le traiter de menteur en face-à-face, car, terrible sanction, il leur retournera le compliment. J’en tremble en l’écoutant. Malheureusement pour lui, on ne peut plus croire un ministre sur parole, fût-il le Premier, depuis l’affaire Cahuzac, quand, en 2013, il affirmait devant la représentation nationale avec un aplomb sans pareil et des accents de sincérité à émouvoir les pierres « qu’il n’avait jamais eu de compte à l’étranger » avant de devoir se rétracter et admettre l’existence de ces comptes créés pour échapper aux impôts qu’il était supposé lever comme ministre du Budget. On peut également se souvenir du fameux débat télévisé qui avait opposé entre les deux tours de la présidentielle de 1988, le président en exercice François Mitterrand, et son Premier ministre de cohabitation, Jacques Chirac. Ce dernier met alors au défi son adversaire de contester sa version des faits sur les otages français détenus en Iran, en le regardant dans les yeux. Il s’attire la réplique cinglante dont Mitterrand avait le secret : « dans les yeux, je la conteste ». Il convaincra les Français de sa sincérité, et remportera l’élection.
François Bayrou ne dispose pas des talents de tribun de l’ancien président ni de ceux de Jean-Luc Mélenchon, par exemple. Ses déclarations, sincères ou non, ne sont pas aussi nettes et tranchantes. Son embarras, y compris sur des sujets relativement simples, est patent et son expression, emberlificotée. Comme Pinocchio, son nez le trahit, même quand il dit la vérité. Et encore ne témoigne-t-il pas sous serment, ce qui pourrait changer si les députés demandaient et obtenaient une procédure d’enquête parlementaire. Nous ne sommes pas aux États-Unis, où le mensonge d’état peut coûter sa place à un président en exercice plus sûrement que s’il tuait un quidam dans la rue. Toutefois, la stratégie de tout nier en bloc peut se révéler dangereuse, si le moindre élément se révèle fondé et que l’intéressé est convaincu d’avoir menti sous serment, ne serait-ce que par omission. Il serait quand même paradoxal que le Premier ministre tombe sur de tels faits après avoir échappé à la censure sur des points autrement plus importants.