Géométrie variable

La « réunion informelle » qui se tient aujourd’hui à Paris à l’invitation du président Macron est une illustration de l’imbroglio dans lequel se trouve placée l’Europe, au sens géographique du terme. En effet, le président français a annoncé la venue de représentants de 8 pays européens, présentés comme les plus importants. Les autres nations apprécieront, qui ne sont pas habituées comme nous, aux maladresses chroniques d’Emmanuel Macron, capable de nous fâcher avec n’importe qui, sans même  s’en apercevoir. Pour discuter des enjeux sécuritaires de notre continent, il y aura des représentants de différentes instances, dont on ne sait plus très bien quels sont leurs rôles respectifs.

Certains pays présents font partie de l’Union européenne, également représentée par sa présidente Ursula von der Leyen, mais pas tous, comme le Royaume uni qui nous a quittés, et semble tenté par un nouveau rapprochement, sur certaines questions, dont la sécurité. La plupart des nations participantes font également partie de l’OTAN, dont le secrétaire général, Mark Rutte, sera là, mais il parait exclu de faire intervenir l’OTAN ès qualités dans le conflit déclenché par la Russie contre l’Ukraine. On sent toutefois un certain vent de panique devant la stratégie de bulldozer de Donald Trump qui a trouvé un allié de circonstance en Vladimir Poutine. Pour mettre fin à la guerre et se parer d’une étiquette de pacificateur, le président américain a concédé à l’autocrate russe la totalité de ses exigences avant toute négociation. Il est déterminé à faire sa petite affaire en tête-à-tête, sans consulter personne, surtout sans les Européens, qu’il traite en quantité négligeable, et que son vice-président insulte en prétendant leur donner des leçons de démocratie et de liberté d’expression.

Pire encore, il n’envisage pas de permettre aux Ukrainiens de s’assoir à la table de négociation, si d’aventure elle se profile. Tout au plus lui donnera-t-il peut-être les résultats un peu avant les autres nations concernées. Il apparait de plus en plus que les Européens vont devoir s’organiser de façon autonome pour assurer leur défense, sans être dépendants de la protection américaine, dont on voit à quel point elle peut être aléatoire, selon le parti au pouvoir. Donald Trump a prévenu les Européens : ils devront consacrer un budget plus important à leur défense. En ce cas, pourquoi ne pas s’organiser entre eux pour relancer une vieille idée, l’Europe de la défense, au service de ses intérêts ? La Grande-Bretagne a déclaré être prête à déployer des troupes au sol en cas d’accord de cessez-le-feu entre les belligérants en Ukraine, répondant à une suggestion américaine. Cela pourrait être une amorce d’organisation commune. Encore faudrait-il une réelle volonté de cessation des hostilités de la part de Poutine, et un engagement sincère dans un processus pouvant déboucher sur un accord. Et rien n’est moins sûr.