Le vrai du faux

Bien difficile à démêler dans l’état de l’enquête ouverte sur le refus d’accueillir un groupe de 150 jeunes israéliens âgés de 8 à 16 ans par le gérant d’un parc de loisirs dans les Pyrénées orientales jeudi dernier. Selon les enquêteurs, le gérant aurait justifié son refus par des « convictions personnelles », sans plus de précisions. Si ces faits sont exacts, on ne peut que conclure à une discrimination fondée sur la religion ou la nationalité, très probablement en lien avec le conflit israélo-palestinien qui se poursuit. Un tel acte antisémite est passible de trois ans d’emprisonnement, et justifie la garde à vue du gérant, prolongée ensuite de 24 heures.

C’est en tout cas la réaction du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qui s’est aussitôt érigé en enquêteur, gardien de l’ordre public, procureur et juge pour condamner fermement l’attitude du suspect et réclamer son châtiment, sans s’embarrasser des droits de la défense, quel que soit le motif de l’infraction. Et précisément, il existe une autre version des faits, selon laquelle le gérant aurait avisé la veille de la venue prévue du groupe, son intention de fermer le parc pour la journée afin de vérifier l’ensemble des installations après les orages ayant frappé la région. Cette décision a d’ailleurs été publiée sur Facebook et peut donc être vérifiée. Cela n’empêche pas l’enquête de se poursuivre, et notamment permet de vérifier l’absence d’antécédents racistes ou antisémites d’un homme qui avait apparemment accueilli régulièrement d’autres israélites par le passé. Tout ce qui touche à l’antisémitisme réel ou supposé est actuellement piégé du fait des tensions extrêmes liées à la situation à Gaza. La guerre fait rage et la bataille de l’image en fait partie.

Cet épisode fait suite à plusieurs autres, plus ou moins médiatisés, dont le dernier en date a consisté dans la destruction particulièrement imbécile d’un arbre du souvenir qui avait été planté pour commémorer la mort horrible d’Ilan Halimi, victime du gang des barbares, à cause d’une croyance infondée sur la fortune supposée des juifs. Un peu plus tôt cette année, ce sont 50 jeunes de confession juive qui ont été débarqués par la compagnie aérienne Vueling. Il est très difficile d’établir la vérité dans beaucoup d’incidents plus ou moins graves, liés à l’antisémitisme. Les statistiques elles-mêmes sont sujettes à caution. On entend régulièrement parler d’une « flambée » des actes antisémites en France, mais la réalité c’est que leur nombre fluctue énormément d’une année sur l’autre et qu’il est difficile, voire impossible, de dégager une tendance sur le moyen ou le long terme. Sur le premier semestre 2025, les actes antisémites auraient ainsi baissé de 24 % en 1 an, mais auraient doublé par rapport à 2023.