Chemin de croix

« Monsieur le président, comment avez-vous pu nous mettre dans cette situation ? » C’est en substance (je n’ai pas retrouvé la citation exacte) ce qu’une habitante de l’île de Sein, pourtant favorable à Emmanuel Macron, lui a dit à l’occasion de son passage pour commémorer l’appel du 18 juin 1940 prononcé par le général de Gaulle. Cette apostrophe énoncée sur un ton égal de la part d’une personne plutôt BCBG, très loin d’une pasionaria exaltée, résume à elle seule l’étendue du désenchantement des partisans du président, et exprime le désarroi d’une population déboussolée par ses décisions, auxquelles personne ne comprend plus rien.

Retour vers le futur

On a coutume d’expliquer le présent par des retours sur des périodes de l’histoire avec lesquelles nous croyons percevoir, à tort ou à raison, des similitudes. La montée de l’extrême droite, qui se confirme élection après élection, nous ramène, bon gré, mal gré, à ce qui semble un évènement fondateur de cette progression. Il s’agit du coup de tonnerre provoqué par l’accession de Jean-Marie Le Pen au 2e tour de l’élection présidentielle le 21 avril 2002, alors que les électeurs et l’ensemble des médias étaient persuadés que le match serait circonscrit au duel entre le président sortant, Jacques Chirac, et son Premier ministre de cohabitation, Lionel Jospin.

Demandez le programme

Après une courte phase de sidération à la suite de la décision surprise et incompréhensible du président Macron de dissoudre l’Assemblée nationale au pire moment, même pour lui, les appareils de partis politiques ont tenté de se mettre d’accord dans un temps record sur des programmes de gouvernement, et des candidats à la députation pour les incarner. Il reste aux uns et aux autres à convaincre les électeurs de la faisabilité de leurs orientations, et notamment à chiffrer les mesures économiques proposées pour améliorer le sort des Français, et aussi pour équilibrer un budget déjà épinglé par les agences de notation et la Commission européenne.

L’injuste milieu

La « sagesse populaire », qui n’a parfois de sagesse et de populaire que le nom, voudrait que la tempérance soit la pierre de touche par excellence de la vertu, celle qui se tient à équidistance des excès, tenus pour le mal absolu. Le raisonnement, appliqué à la politique, voudrait donc que l’on se tienne éloigné des positions extrêmes, et que cela constitue l’alpha et l’oméga de toute réflexion. C’est une forme de paresse intellectuelle que de se dispenser ainsi de penser par soi-même et de se fier uniquement à la personne qui défend le point de vue pour se forger une conviction.