Gesticulation

C’est à cet exercice que s’est livré Donald Trump sur son réseau social, avant de partir se reposer pour un week-end de golf devenu rituel dans sa propriété de Floride. Il a en effet répondu directement à l’ancien président russe, Dmitri Medvedev, qui l’accusait de « rapprocher les États-Unis d’une guerre avec la Russie » par ses ultimatums, en déployant deux sous-marins nucléaires prêts à toute riposte éventuelle. Comme si les Américains ne maintenaient pas en permanence leur dispositif de défense, comprenant naturellement des moyens « discrets » permettant de répliquer à toute attaque, conventionnelle ou nucléaire. Son but est évidemment d’impressionner l’adversaire potentiel en montrant sa détermination, et également de rassurer son électorat sur sa capacité à faire front à la Russie.

Ce faisant, il prend le risque de donner corps à une menace émanant d’un personnage de second rang, dont l’influence est modeste comparée à celle de Vladimir Poutine. Une réponse à ces provocations par l’intermédiaire du vice-président américain eût été amplement suffisante, et mieux calibrée. Au fond, Medvedev n’a fait que reprendre certaines des déclarations du propagandiste en chef de la télévision d’état, Vladimir Soloviev, qui, par ailleurs, appelait récemment à frapper la France en des termes crus et en insultant nos dirigeants. On se croirait revenu à l’époque de la guerre froide, où le chef de l’Union soviétique, Nikita Krouchtchev, piquait une colère homérique en 1960 devant l’Assemblée générale de l’ONU, allant jusqu’à, dit-on, frapper son pupitre avec une chaussure, un geste démenti, mais hautement symbolique.

Plus importante et largement démontrée, la découverte de la construction de rampes de lancement de missiles, possiblement nucléaires, à Cuba, ouvre une crise entre les deux grandes puissances. Une guerre nucléaire sera évitée de justesse, grâce au sang-froid des deux dirigeants, Russe et Américain et leur dialogue direct permettant une désescalade aboutissant à un compromis. Donald Trump reconnait d’ailleurs le risque de voir la situation dégénérer, simplement sur des paroles qui peuvent avoir des « conséquences imprévues ». Bien qu’il se juge omniscient, le président américain serait bien inspiré de déléguer ces discussions subalternes aux échelons compétents de son administration. Il va sans doute avoir du mal à se dépêtrer d’une situation qu’il a lui-même créée par son ultimatum. Il a admis que les sanctions envisagées ne seraient peut-être pas efficaces et qu’il n’y croyait guère. Poutine a donc beau jeu d’attendre, en maintenant des exigences inacceptables pour obtenir une « paix » qui équivaudrait à une capitulation pure et simple de l’Ukraine. Que ça plaise ou non à Donald Trump, une défaite de l’Ukraine serait interprétée comme un revers des Occidentaux, et le prélude à de nouveaux conflits dans le but de « récupérer » les territoires de la « grande Russie » d’autrefois.