
La proie et l’ombre
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 9 août 2025 11:06
- Écrit par Claude Séné

Dans le feuilleton de la guerre imposée à l’Ukraine par une Russie plus conquérante que jamais et qui devait être réglée en 24 heures par la seule aura d’un Donald Trump revenu aux affaires pour le plus grand bien de l’humanité, nous en étions restés à l’ultimatum annoncé par le président américain mettant son homologue russe en demeure d’arrêter les hostilités, ou à tout le moins de donner un signe de bonne volonté pour un cessez-le-feu. Rien de tout ça ne transparaissait vraiment malgré des échanges téléphoniques et l’envoi d’un émissaire américain russophile auprès de Vladimir Poutine, quand Donald Trump, juste avant de perdre la face en constatant que ses injonctions et menaces avaient fait long feu, a pu sortir de son chapeau un projet de rencontre au sommet.
Dans la foulée, nous apprenions que l’entrevue aurait lieu le 15 août en Alaska, un territoire acheté en 1867 à la Russie par les États-Unis, tout un symbole de la « politique » de Donald Trump, basée sur des échanges marchands. Il sera évidemment question de l’Ukraine, mais sans son président, car Poutine a décrété que « les conditions n’étaient pas remplies » et Trump s’en moque, visiblement. L’objectif annoncé sera pourtant, selon le président américain, de discuter d’un « échange de territoires ». Si l’on voit bien ce que la Russie voudrait obtenir : les oblasts qu’elle occupe déjà partiellement ainsi que l’officialisation de l’annexion de la Crimée, on peine à identifier le moindre territoire qu’elle serait éventuellement prête à céder en échange. Les journaux ne s’y sont pas trompés qui ont traduit la formule en « concessions territoriales » exigées de Zelensky, qui est tenu par la Constitution de les refuser catégoriquement. Mais Trump n’en a cure. Ce qu’il veut c’est une poignée de main photogénique, sur le modèle de celle obtenue par le président Clinton entre Yitzhak Rabin, Premier ministre israélien, et Yasser Arafat, chef de l’Organisation de libération de la Palestine.
S’il peut faire des affaires au passage, sur l’exploitation des terres rares en Ukraine par exemple, ce sera un bonus non négligeable. Il est prêt à tout concéder pour une décoration, un hochet, témoin de la reconnaissance du monde pour son action. Aux Européens de gérer cette nouvelle guerre froide éventuelle, pendant que les États-Unis se concentreront sur la zone Pacifique. Poutine l’a bien compris, qui se voit au pouvoir encore longtemps et peut donc prendre son temps. Il a planté les dents dans sa proie du moment et ne compte pas la lâcher si facilement. Son modèle de négociation semble basé sur « ce qui est à moi est à moi, et ce qui est à toi… ça se discute. » Si, pour arriver à ses fins, il est nécessaire d’en passer par une paix provisoire ou un cessez-le-feu plus ou moins respecté, il le fera. La suite au prochain numéro.
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