Le bon sens des Français

Devant l’accumulation de signaux négatifs pour une rentrée qui s’annonce très difficile, François Bayrou a choisi la stratégie préconisée par Jean-Claude Dusse, alias Michel Blanc dans « Les bronzés font du ski » : « oublie que t’as aucune chance, vas-y, fonce, on sait jamais, sur un malentendu ça peut marcher… » Menacé de toute part par les partis politiques de se faire censurer et renvoyé à ses chères études historiques, faisant face à un risque de blocage du pays, combattu par les syndicats et les corps intermédiaires, il va tenter de contourner les diverses oppositions qui l’ont pris pour cible privilégiée en s’adressant directement aux Français.

Il va donc donner une conférence de presse ce lundi pour défendre bec et ongles un projet de budget 2026 qui est supposé obtenir l’adhésion populaire parce qu’il ferait faire des sacrifices à tous les Français. Manque de chance, chacun regarde son porte-monnaie et constate les dégâts, à l’exception d’une petite caste de privilégiés, qui passeront entre les gouttes de l’austérité, mais ne font pas une majorité politique. Le meilleur baromètre du rejet de ce projet, c’est sans doute la position d’un député issu du même parti que François Bayrou, le Modem, qui a trouvé une formule qui risque de faire florès. Il demande au Premier ministre de « revoir sa copie » parce qu’il ne peut pas le laisser « piquer deux jours » aux Français. Car dans un projet globalement très injuste, c’est la suppression de deux jours fériés qui cristallise le sentiment des Français et leur opposition aux efforts qui leur sont demandés.

Le député Modem du Loiret, Richard Ramos, qui avait déjà menacé de voter la censure sans passer à l’acte, préconise de récupérer les 4 milliards d’économies sur les jours fériés par un prélèvement sur les plus riches. Il veut croire que le Premier ministre, qui n’a « qu’un trou de souris pour se faufiler », va pouvoir ainsi sauver sa peau une nouvelle fois. Jouer le peuple contre les élites ne serait pas une première, mais pour que la manœuvre réussisse il faudrait que le Premier ministre bénéficie d’une bonne cote de popularité, ce qui est loin d’être le cas. Seuls 12 % de Français lui faisaient confiance en fin juillet, soit une perte de 9 % par rapport à février. C’est un record négatif absolu à ce poste, quand Emmanuel Macron ne fait guère mieux avec 21 % de confiance, niveau le plus bas de son second quinquennat. Qu’on l’appelle rigueur, austérité, efforts ou sacrifices budgétaires, on voit bien que la pilule ne passe pas. Ce mécontentement larvé pourrait trouver un débouché dans le mouvement de blocage initié par une base informelle et soutenu progressivement par la plupart des organisations, qui veulent « coller » à l’opinion. La rentrée s’annonce mouvementée.