Fumer fait tousser

Ce slogan, utilisé par le réalisateur Quentin Dupieux comme titre d’un de ses films qui ne laissent personne indifférent et personnellement me mettent généralement en joie, a trouvé une nouvelle illustration avec un minuscule fait-divers qui a fait le tour des réseaux sociaux ces jours derniers. On voit dans une vidéo filmée par une touriste lettonne, un homme allumer sa cigarette à l’aide de la flamme du soldat inconnu sous l’Arc de Triomphe à Paris, avant de poursuivre tranquillement son chemin. En qualité d’ancien fumeur repenti, je ne peux que désapprouver cette pratique pour un tas de raisons, dont la principale serait qu’elle peut amener son auteur devant les tribunaux.

Voici comment le ministre de l’Intérieur en personne a qualifié les faits qui sont reprochés au suspect, un SDF marocain de 47 ans : « violation de sépulture, tombeau, urne ou monument édifié à la mémoire des morts ». Il risque un an de prison et 15 000 euros d’amende, mais il est probable que Bruno Retailleau préfère lui retirer son permis de séjour valable jusqu’en octobre prochain, en regrettant que l’intéressé ne soit pas de nationalité algérienne, qui en aurait fait un symbole dans le combat personnel du ministre. Il me semble que Bruno Retailleau, qui a qualifié ce geste « d’indigne et misérable » en fait un peu trop et monte en épingle un incident, certes regrettable, pour en faire une affaire d’État hautement symbolique, là où il n’y a, à mon sens, qu’un simple fait-divers à qui l’on réserve un traitement médiatique excessif. Il faut dire que l’homme interpelé toutes affaires cessantes coche toutes les cases du coupable idéal. Un étranger qui profane un symbole du patriotisme en France. Toléré sur le sol français, il peut être expulsé du jour au lendemain, d’autant plus qu’il a déjà été condamné pour vol de voiture, injures, violence ou dégradation…

C’est une nouvelle occasion pour le ministre de l’Intérieur de se pousser du col en incarnant une ligne dure sur les questions de l’immigration et de l’ordre public en affichant une position intransigeante. Il y est d’autant plus encouragé que le président Macron a lui-même apporté de l’eau à son moulin en donnant des instructions au gouvernement afin de suspendre l’accord de 2013 avec l’Algérie qui exemptait de visas les personnalités algériennes se rendant en France. Précisément ce que demandait Bruno Retailleau pour faire pression afin d’obtenir des avancées dans le dossier de Boualem Sensal, en attente de son procès en appel ou d’une grâce présidentielle espérée, ou celui de Christophe Gleizes, ce journaliste sportif français, condamné récemment à 7 ans de prison pour des accusations fantaisistes d’apologie du terrorisme.