La guerre de l’eau aura-t-elle lieu ?

Le mois de juillet qui vient de se terminer aura été le plus sec depuis 1959. Cette sécheresse, couplée à des températures caniculaires, fait craindre une situation qui mettrait en concurrence les différends usagers de l’eau en France. Pour l’instant, on en est au stade de la vigilance, avec des restrictions modérées, comme l’interdiction d’arroser aux moments les plus chauds de la journée, mais la situation pourrait s’empirer, provoquant de véritables pénuries dans les régions les plus touchées, en instaurant des quotas et des coupures arbitraires touchant à la fois les particuliers et les professionnels.

L’eau courante est devenue le symbole du confort moderne. Grâce au réseau de distribution collectif, les Français ont désormais accès au robinet sur l’évier, avec une prodigalité héritée d’un passé récent d’abondance, qui aboutit à l’aberration de l’utilisation de l’eau potable pour les toilettes, par exemple. Assez rares sont les habitations qui ont conservé l’alimentation exclusive en eau par l’intermédiaire d’un puits personnel, sans se raccorder, ne serait-ce que par précaution, au réseau collectif. Mais la question est plus globale, et la baisse des réserves en eau douce, ne serait-ce que par le recul constant des glaciers, fait craindre le pire. Le développement des surfaces bétonnées par l’extension urbaine et l’emprise au sol grandissante est aussi un facteur de perte d’eau par ruissellement. L’agriculture est évidemment le premier « client » de la ressource, et le développement de cultures gourmandes en eau, telles que le maïs, impose une augmentation massive de la consommation. Les agriculteurs tentent bien de constituer des réserves, sous forme de « bassines », mais l’efficacité trouve rapidement ses limites. Et l’eau consommée à un endroit finit toujours par manquer à un autre. Pendant que les agriculteurs tentent de sauver leurs récoltes en irriguant, pêcheurs et protecteurs de l’environnement se rejoignent pour essayer de conserver des poissons menacés d’asphyxie par un niveau d’eau trop bas dans les rivières.

Dans certains bassins hydrologiques, il faudra choisir entre les activités agricoles, le maintien des canaux pour relier les cours d’eau, les activités nautiques et de loisir, et les arbitrages s'annoncent difficiles. Sans oublier les besoins en refroidissement des réacteurs nucléaires, qui promettent d’être de plus en plus problématiques avec un programme annoncé d’une cinquantaine de nouveaux EPR. La ressource en eau promet d’être l’enjeu le plus important des prochaines années, encore plus que l’énergie, qui nous préoccupe tant aujourd’hui. La solution ne pourra pas tomber exclusivement du ciel, car le réchauffement climatique est déjà acté et pour longtemps. Cependant, la récupération des eaux pluviales devrait devenir la règle dans toute construction, et il existe un gisement très substantiel d’économie quand on sait que le réseau collectif laisse « fuiter » environ 20 % de son précieux liquide par manque d’étanchéité.