
Toile d’araignée
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 3 juin 2025 11:07
- Écrit par Claude Séné

C’est le nom de code qui avait été choisi pour désigner l’opération secrète de l’armée ukrainienne qui vient de toucher la Russie au cœur de son dispositif de bombardement aérien, en détruisant ou en endommageant 41 appareils, soit environ un tiers de l’aviation stratégique utilisée pour cibler les principales villes ukrainiennes. Les dégâts seraient estimés à 7 milliards de dollars, ce qui n’est pas négligeable, mais c’est surtout la portée symbolique de ce raid qui est remarquable. Les drones utilisés pour effectuer cette opération ont pu être acheminés en plein cœur de la Russie, jusqu’à la Sibérie, sans être repérés. L’effet de surprise a été total, et c’est avant tout une victoire des services secrets ukrainiens et un camouflet pour le pouvoir russe.
Ce succès ne peut pas à lui seul changer le cours de la guerre, mais, intervenant à la veille de la reprise des pourparlers en vue d’un cessez-le-feu, il démontre que l’Ukraine n’a rien perdu de sa détermination et de sa capacité à infliger des revers à son adversaire, malgré le sombre pronostic récent du président des États-Unis prétendant que Volodymir Zelensky « n’avait pas les cartes en main ». Le succès de la « toile d’araignée » est aussi la démonstration de l’importance décisive de l’utilisation des drones, devenus un atout maître de la guerre moderne, dans laquelle les Ukrainiens sont passés maîtres. Ils compensent ainsi leur infériorité démographique et leur budget global plus faible. Là où des missiles de croisière russes peuvent coûter jusqu’à 6,5 millions de dollars, un drone équipé d’une simple charge explosive équivalent à une grenade, valant quelques centaines d’euros, peut endommager gravement un bombardier au sol. Pour autant, l’Ukraine reste réaliste. La population est épuisée par un conflit qui dure depuis trop longtemps. Son objectif immédiat reste d’obtenir au minimum un accord sur une trêve.
Le président ukrainien appelle encore une fois Donald Trump à faire pression sur Wladimir Poutine pour l’amener à négocier sans poser des conditions déraisonnables telles que celles qui figureraient dans le mémorandum de la Russie, qui équivaudraient à une capitulation totale. Le président des États-Unis semble le seul à pouvoir obtenir des concessions de la part de la Russie. Encore faut-il qu’il les demande, et avec suffisamment de fermeté et de détermination pour être entendu. Jusqu’à présent, la stratégie de Donald Trump a reposé exclusivement sur la préservation d’une illusion d’entente avec Vladimir Poutine, dans l’espoir de s’en faire un allié dans la compétition commerciale mondiale, dans laquelle l’adversaire principal serait plus que jamais la Chine. Il est prêt à sacrifier l’Ukraine pour parvenir à ses fins, et l’on n’est même pas certain qu’il se joindrait à une initiative de l’OTAN si un pays membre était attaqué. Volodymyr Zelensky en a tiré la conclusion qui s’imposait en s’aidant pour que le ciel l’aide à son tour.