Un traitement de faveur

Les plus fidèles d’entre vous se rappelleront probablement qu’à l’époque où il dirigeait le pays, je considérais Nicolas Sarkozy comme le bienfaiteur du chroniqueur tant il s’appliquait à multiplier les bévues et à proférer des déclarations scandaleuses. Pas un jour ne passait sans son lot de sujets d’indignation ou de ridicule. Il semblerait qu’Emmanuel Macron ait décidé de relever le défi. L’année 2019 part ainsi sur les chapeaux de roue avec l’arrestation musclée et la mise en garde à vue d’une des figures marquantes du mouvement des gilets jaunes, Éric Drouet.

Il jouait du pipeau debout

C’est peut-être un détail pour vous, mais pour lui ça veut dire beaucoup… (air connu). Vous avez échappé à ce titre au lendemain des vœux présidentiels parce que je ne voulais pas donner l’impression que je m’acharnais sur le chef de l’état. Mais une chronique, c’est un peu comme une recette de cuisine. Certaines sont faites pour être dégustées sur le pouce, avec le charme de la spontanéité, quand d’autres nécessitent de mijoter plus longuement et l’on espère qu’elles seront encore meilleures réchauffées. Voici donc les vœux de Macron, passés à la moulinette pour tenter de les rendre comestibles.

Le signal-prix

En ce premier jour de cette nouvelle année, pardonnez-moi de vous entretenir d’un sujet trivial formulé dans cette langue étrange que n’utilisent guère que les intellectuels technocratiques. Et pourtant, il s’agit de notre porte-monnaie et cela concerne donc notre vie quotidienne. J’entendais ainsi, pas plus tard qu’hier, une économiste distinguée s’affliger de l’abandon forcé de la fiscalité dite écologique frappant les carburants, qui devait s’appliquer à compter d’aujourd’hui et qui a déclenché le mouvement de protestation des gilets jaunes. Selon son raisonnement, plus le carburant est cher, moins les gens roulent, ce qui est bon pour l’écologie.

Monsieur le Président,

Je vous fais une lettre, mais ne vous rassurez pas, je n’ai nulle intention de déserter et je compte bien continuer à chroniquer ma vie quotidienne, loin des fastes et des ors de la République dont semblez aimer user et abuser. Quand Boris Vian s’adressait en 1954 à votre prédécesseur, René Coty, pour l’inciter à arrêter les massacres coloniaux, l’abbé Pierre tirait la sonnette d’alarme et en appelait à la solidarité nationale. Quelques années plus tard, Jean Ferrat rendait hommage à l’auteur du Déserteur dans la chanson Pauvre Boris où il constatait que rien n’avait vraiment changé.