Rien de nouveau pour la justice
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 15 octobre 2022 11:06
- Écrit par Claude Séné
S’il est une chose difficile, sinon impossible, pour la Justice, c’est bien de reconnaitre que, peut-être, éventuellement, elle pourrait avoir rendu un jugement injuste, ou, à tout le moins, avoir commis une erreur, fut-elle de bonne foi. L’exemple le plus fameux en reste probablement l’affaire Seznec, du nom de Guillaume Seznec, reconnu coupable du meurtre de Pierre Quémeneur et condamné en 1924. La famille Seznec demandera à 9 reprises la révision du procès entre 1926 et 2001, sur la foi d’éléments nouveaux, sans jamais être écoutée. La deuxième demande de révision du procès d’Omar Raddad a elle aussi été rejetée, malgré des motifs sérieux de réexamen de sa culpabilité.
L’affaire du jardinier marocain, connue pour cette inscription attribuée à la victime, Ghislaine Marchal, avec son propre sang : « Omar m’a tuer », a suscité, dès le début, des polémiques dans l’opinion publique. Cette dénonciation post mortem, assortie d’une faute d’orthographe très surprenante pour cette femme cultivée, paraissait et parait toujours sujette à caution. À tout le moins, elle permettait d’introduire un doute raisonnable sur la culpabilité de l’accusé, un doute qui aurait dû lui profiter en l’absence de preuves matérielles et d’aveux. Mais le verdict une fois tombé, il est sacralisé et comme gravé dans le marbre. Ce n’est pourtant pas un hasard si Omar Raddad a bénéficié d’une grâce présidentielle partielle en 1996, soit deux ans seulement après la condamnation, comme si l’état avait voulu annuler les conséquences de ce qui pourrait bien être une erreur judiciaire, et non des moindres, sans toutefois la reconnaitre, au nom d’une fierté mal placée. Tout se passe comme si l’institution judiciaire se réclamait d’un dogme d’infaillibilité, pourtant réservé exclusivement aux papes. Seules onze erreurs judiciaires ont été reconnues à ce jour en France, et visiblement à contrecœur.
Omar Raddad ne sera donc probablement pas le 12e condamné réhabilité, à moins que des preuves formelles ne le disculpent. Cependant, l’avocate chargée de sa défense a fait valoir que des traces d’ADN inconnus, quatre, pour être précis, ont été retrouvées, mêlées au sang de la victime, ce que le tribunal a écarté au motif d’une pollution accidentelle possible de la scène de crime et des scellés effectués. Il aurait suffi de diligenter une enquête complémentaire sur de nouveaux suspects apparus dans l’affaire, pour peut-être identifier l’un d’entre eux. C’est précisément ce que le tribunal a rejeté, comme s’il craignait un résultat positif démontrant les lacunes judiciaires et policières. On a appris récemment que les gendarmes avaient eu une piste sérieuse, qu’ils n’ont pas été autorisés à suivre et qui aurait pu disculper le jardinier. Elle menait au grand banditisme niçois, et à une tentative de cambriolage qui aurait mal tourné, avec une tentative grossière d’aiguiller les soupçons vers le « coupable idéal ». Encore aurait-il fallu enquêter sans œillères.