Cachez ce deal
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 10 octobre 2022 11:11
- Écrit par Claude Séné
Que je ne saurais voir ! Gérald Darmanin, dont on était bizarrement sans nouvelles depuis quelques jours, voire quelques semaines, s’est rappelé à notre bon souvenir en lançant une énième opération de nettoyage dans le nord-est de Paris. Un millier de policiers et de gendarmes ont fait évacuer manu militari le square de Forceval près de la Porte de la Villette. Le quartier était devenu invivable à cause du trafic de crack qui attirait des toxicomanes préférant camper sur place dans des conditions innommables pour obtenir leur dose sans devoir se déplacer, et les dealers, certains d’écouler leur « marchandise », avec tout le cortège des nuisances engendrées par le trafic.
Les riverains étaient excédés, et on les comprend, mais leur soulagement ne sera que très provisoire, car le fond du problème est très loin d’être réglé. Comme c’est devenu l’habitude en France, on s’est encore une fois contenté de glisser la poussière sous le tapis et de déplacer le problème. Les associations, telles que Médecins du monde, qui interviennent dans le secteur demandaient évidemment une prise en charge globale des personnes toxicomanes qui passaient leurs journées dans le campement. Les chasser purement et simplement sans leur proposer une aide pérenne est nécessairement voué à l’échec. Tout le monde le sait, y compris le ministre de l’Intérieur qui se contente, comme ses prédécesseurs d’une politique à la petite semaine. Il y a un an presque jour pour jour, c’est le campement des Jardins d’Éole qui était démantelé. Et si l’on remonte le temps, pas d’année depuis 25 ou 30 ans sans l’installation ou le déplacement de ces points de deal, véritables abcès de fixation de la misère des toxicomanes dans les régions de peuplement, au carrefour de l’offre et la demande de drogue. Entre 2005 et 2019, une quinzaine d’évacuations ont tenté de mettre un terme au trafic sur « la colline du crack » près de la porte de la Chapelle. La liste serait trop longue et trop ancienne depuis les années 80 et l’explosion du marché qui se déroule désormais à ciel ouvert.
La méthode employée par les « forces de l’ordre », laisser se former des ilots de non-droit pour peut-être surveiller plus facilement les activités illicites, jusqu’à ce que la situation devienne invivable et justifie une intervention musclée d’évacuation des usagers, qui sont en fait les premières victimes de l’inefficacité des autorités, a démontré ses limites et signe l’échec du pouvoir. Le ministre a donné un an à Laurent Nuñez cet été pour venir à bout du trafic sur lequel son prédécesseur à la préfecture de Paris, Didier Lallement, de sinistre mémoire, s’est cassé les dents. C’est à double tranchant. Il n’aura pas besoin de chercher bien loin un bouc émissaire en cas d’échec quasi certain d’une politique du tout répressif, mais risque fort d’être aspiré par le naufrage annoncé.