Un métro de retard

Les députés ont approuvé jeudi dernier une proposition de loi interdisant le démarchage téléphonique lié au compte personnel de formation. On ne peut que s’en réjouir, tout en constatant que cette loi, si elle est mise en application, et même si elle est suivie d’effet, arrive bien tard et ne résout qu’une partie du problème du démarchage abusif qui exaspère la plupart des Français, dont je fais partie, et confine au harcèlement. S’en prendre spécifiquement au démarchage concernant le CPF ne règlera pas les sollicitations incessantes sur tous les autres produits dont nous n’avons généralement que faire.

Avant le CPF, c’est le démarchage sur les assurances qui a été dans le collimateur au printemps dernier pour réduire les abus constatés dans ce domaine et mettre fin à des pratiques douteuses. Faudra-t-il en arriver à voter une loi spécifique pour chaque produit faisant l’objet de ces propositions commerciales ? On peut compter sur les commerçants pour s’engouffrer dans la moindre faille du système, sans compter les véritables escrocs, comme dans le cas du CPF, toujours prêts à vendre ce qui ne leur appartient pas en profitant de la faiblesse de leurs victimes, souvent des personnes dépendantes. Le démarchage téléphonique est devenu un véritable fléau. Dernièrement, on interviewait un retraité qui en a fait sa croisade, en s’ingéniant à compliquer la vie des démarcheurs. Outre que cela lui demande un temps fou (il relève tous les appels dont il fait l’objet depuis plusieurs années), le combat est perdu d’avance. Et il ne dérange que les salariés qui travaillent pour ces plateformes, et qui sont eux-mêmes exploités.

Il y a quelques années, le gouvernement a créé un instrument censé résoudre le problème. Chaque citoyen potentiellement harcelé peut s’inscrire sur une liste, Bloctel, pour signifier son refus du démarchage. Les entreprises étaient supposées rayer de leurs appels tous les numéros répertoriés. Je me suis inscrit, à l’époque, sans effet notable sur le nombre de coups de fil indésirables. On pouvait même se demander si cette liste ne servait pas d’annuaire pour les commerciaux. Évidemment, il est loisible au démarché de signaler le démarcheur hors-la-loi. Il encourt une amende, mais la volonté de l’état n’est pas suffisamment ferme pour dissuader les entreprises concernées. Personnellement, j’ai donc fait l’acquisition d’un petit boitier qui permet de filtrer les appels. J’élimine ainsi environ 75 appels par mois. L’inconvénient en est un côté dissuasif pour des interlocuteurs légitimes qui ne seraient pas reconnus par le système. Ce serait pourtant possible et normal d’empêcher les particuliers d’être dérangés par des pratiques commerciales agressives en systématisant les sanctions financières contre leurs auteurs, au lieu de légiférer au cas par cas sans montrer une volonté réelle de mettre fin à cette plaie qui empoisonne la vie des Français.