Nom d’un petit bonhomme !

En réponse à la déclaration du président de la République annonçant que même en cas de victoire de la nouvelle union populaire, écologiste et sociale (NUPES) aux prochaines élections législatives, il n’appellerait pas Jean-Luc Mélenchon comme Premier ministre, Manuel Bompard s’est exprimé familièrement par un « bah, si bonhomme, tu vas le nommer ! » qui semble avoir fort déplu à la nouvelle porte-parole du gouvernement, Olivia Grégoire, probablement en service commandé, exprimant ainsi la voix de son maître. Après tout, c’est son boulot, même si son indignation paraît totalement factice.

Le président, quand ça l’arrange, exigerait donc que l’on y mette les formes et qu’on fasse preuve de « respect républicain ». Ce qui ne l’empêcherait nullement de pratiquer lui-même une communication directe, proche des gens, mais seulement s’il en décide ainsi, et la réciproque ne saurait être admise. C’est bien le même qui prend la mouche pour une expression pourtant guère agressive, et qui traitait les Français de gens de rien, quand ils ne faisaient pas partie des privilégiés et ne savaient même pas traverser une rue pour trouver du travail. Franchement, on a vu pire, comme insulte, et les noms d’oiseaux ont parfois volé à plus basse altitude dans l’hémicycle ou ailleurs. On peut même faire appel à l’étymologie pour en tirer la notion d’homme bon, et il faut chercher la petite bête pour n’entendre qu’un sens péjoratif. Pas de quoi fouetter un chat, entre nous. On sent le gars à bout d’arguments qui ne peut plus avancer que celui de l’autorité. Oups ! j’ai dit « le gars » au lieu de « Monsieur le Président de la République ». Honte à moi ! je vais de ce pas lui donner son grade exact : Son Altesse Sérénissime Emmanuel Premier. Ça va, là ? J’ai bon ?

Alors je suis au regret de devoir contredire SAS, mais si le PR décide d’appeler un PM non issu de la majorité nouvelle éventuellement sortie des urnes, il s’expose à le voir renversé par une motion de censure, ou incapable d’obtenir la confiance de l’Assemblée. L’esprit de la Constitution, sinon la lettre, impose donc au chef de l’état de nommer la personnalité capable d’obtenir un vote favorable des lois à venir, et notamment le budget de la nation. Les présidents précédents, tout aussi dignes de respect que l’actuel, n’ont pas dérogé à cette règle de bon sens en pratiquant les trois cohabitations de la 5e République, dans l’intérêt du pays. Le président conserve également le droit de dissolution de l’Assemblée, mais la procédure est risquée, et met le pays à l’arrêt le temps de l’organisation du nouveau scrutin. La question est suffisamment sérieuse pour qu’un dirigeant, si haut placé soit-il, accepte de mettre un peu son ego en sourdine, au moins provisoirement.