Humiliation
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 6 juin 2022 11:14
- Écrit par Claude Séné
Entre autres choses, au cours de son interview donnée à la presse régionale, le président Emmanuel Macron est revenu sur le sujet du conflit en Ukraine, en indiquant, je cite, « il ne faut pas humilier la Russie » pour pouvoir jouer les médiateurs quand les combats cesseront. Cette phrase suggère que la Russie serait en passe de perdre cette guerre et que la France serait en position de tenir tête à Vladimir Poutine et de lui dicter sa loi. Si telle était l’intention du président français, il a bien caché son jeu, et les rencontres ou les appels téléphoniques entre les deux dirigeants n’ont rien indiqué de tel.
Les autorités ukrainiennes ont fait remarquer, à juste raison, que cette posture de soumission, si elle humilie quelqu’un, ce serait plutôt Emmanuel Macron. Comme le rappelle le Petit Robert, l’humiliation désigne aussi bien l’action d’humilier autrui, que de s’humilier soi-même. Or, l’attitude de la France, qui consiste à vouloir maintenir à tout prix de bonnes relations avec la Russie, en dépit du fait que c’est elle qui a envahi son voisin, qu’elle a suscité la réprobation de la plupart des pays, et que la France soutient les sanctions décidées à son encontre et envoie du matériel à l’armée ukrainienne, ne peut être interprétée que comme une marque de faiblesse. En tout cas, c’est ainsi que le juge le président Poutine, qui estime être en position de force, et n’a donné officiellement aucun espoir aux partisans de la paix. Pour lui, il suffit que les alliés de l’Ukraine cessent leurs livraisons d’armes pour écourter la guerre et permettre à la Russie de la remporter.
Ce n’est pas entièrement faux si l’on considère les forces en présence avec une supériorité russe en hommes et en armement, compensée par le sentiment patriotique ukrainien très fort, mais qui serait insuffisant sans l’aide des Occidentaux. De tout ce que nous avons vu du comportement de Vladimir Poutine jusqu’à présent, il ne comprend que le rapport de force. Aller négocier avec lui en position de faiblesse est tout simplement suicidaire. L’Ukraine aura déjà bien du mal à conserver la majeure partie de son intégrité territoriale dans l’état actuel du conflit. Elle n’a aucun besoin d’un allié prêt à concéder des provinces ukrainiennes en échange d’une gloire hypothétique de négociateur faiseur de paix. Le plus probable, c’est qu’un cessez-le-feu soit proposé par la Russie quand elle voudra arrêter provisoirement les frais considérables de la guerre, en gelant les territoires conquis sur la ligne de front et en attendant d’avoir reconstitué ses forces pour une nouvelle agression, sans avoir besoin du prétexte d’une supposée humiliation, dont on se demande toujours en quoi elle consisterait. À moins que le dictateur russe soit rattrapé par une des maladies qu’on lui prête et que son successeur se montre plus raisonnable.