C’est ça la démocratie
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 8 décembre 2018 10:09
- Écrit par Claude Séné
Dans l’esprit de ce vieux militant, aucun point d’interrogation n’était supposé suivre cette déclaration péremptoire. Pas l’ombre d’un doute ne semblait le traverser. Tout le monde peut avoir son opinion, on discute, et après on vote. Il y a donc une majorité et une minorité, et la minorité doit se plier aux exigences de la majorité. Grosso modo, c’est ainsi que fonctionne notre démocratie en France, qui est bien préférable, nous sommes d’accord, à la dictature d’une fraction de la population sur le reste des citoyens. Mais les choses se corsent dès que l’on aborde les aspects pratiques.
Toujours selon ce militant pétri de certitudes, la minorité n’a qu’un droit : celui de se taire et de ne pas en penser moins, en espérant qu’un jour ce seront ses idées qui rassembleront le plus de suffrages. Le deuxième pilier de ce système démocratique, c’est la représentation. Sur le papier, tout va bien. On ne peut pas gouverner tous ensemble tout le temps. L’idée, c’est donc de déléguer à des personnes de confiance et pour un temps donné le pouvoir que l’on détient en qualité de citoyen. Et là, généralement, ça se gâte un peu, voire beaucoup. La nature humaine est ainsi faite que le pouvoir attire souvent des ambitieux, qui, consciemment ou non, jugent qu’ils ont toujours raison et sortent allègrement du mandat qui leur a été confié, au nom de leur représentativité. Et c’est ainsi qu’une personne, par exemple le président de la République, qui aura été élu de façon régulière à un moment donné, peut être complètement délégitimé au bout d’un temps plus ou moins court qui ne coïncide pas nécessairement avec la durée de son mandat. Cependant, rien n’est prévu par la Constitution, si l’on excepte le cas d’une démence avérée qui mettrait en péril nos institutions.
Et pourtant, le peuple souverain, à supposer qu’il se soit bien informé sur les intentions des candidats, n’a qu’une conscience un peu diffuse et globale de la politique réelle qui sera menée au quotidien. Il devrait avoir le droit de changer d’avis, et à tout le moins le donner et que les élus en tiennent compte. La démocratie formelle dans laquelle nous vivons est terriblement inadaptée pour ce type d’ajustement. C’est ce qui explique le désarroi profond dans lequel se trouve le pouvoir actuellement. Rarement un Président aura été aussi détesté et haï qu’Emmanuel Macron, pourtant élu confortablement en 2017, au point que sa prise de parole actuellement serait « jeter de l’huile sur le feu » selon son propre entourage. Des modes démocratiques alternatifs sont possibles, comme en ont témoigné des mouvements tels que « nuit debout » en son temps. Il est stupide et contre-productif de s’acharner à exercer un pouvoir aveugle et sourd sans qu’aucune remise en cause soit possible avant la fin des mandats, ni aucune consultation populaire.