Paris brûle-t-il ?
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 3 décembre 2018 10:26
- Écrit par Claude Séné
La réponse est évidemment oui. Si l’on a souvent employé la métaphore de la goutte d’eau qui fait déborder le vase pour décrire la situation qui a amené à la révolte des gilets jaunes, c’est peut-être celle de l’étincelle qui met le feu aux poudres qui s’impose aujourd’hui avec les scènes de guérilla urbaine et les images de voitures incendiées. Le mouvement continue d’être vivace dans les provinces, pardon les régions, pardon les territoires, pardon les quartiers, enfin la France, quoi, y compris ses colonies, excusez-moi, je veux dire les Outremers. Mais quand même, quand la capitale est touchée, ça sent le roussi.
Non seulement les débordements les plus violents ont eu lieu dans Paris, mais pas n’importe où. Le gouvernement, qui voulait circonscrire le périmètre de la contestation dans des lieux assez faciles à contrôler, les théâtres habituels de manifestation, a perdu cette bataille. Plus que l’Arc de Triomphe, c’est le symbole de la richesse et du luxe qui est visé, à travers les Champs Élysées et les beaux quartiers. L’accroissement des forces de l’ordre n’a permis que de multiplier les interpellations et n’a dissuadé aucun casseur, je dirais même au contraire. L’escalade ne peut continuer indéfiniment, et le mouvement, s’il ne se multiplie pas numériquement, semble se radicaliser et ne montre aucun signe d’essoufflement. Faute d’avoir pris au sérieux la révolte populaire quand elle était encore limitée aux questions de prix du carburant, le pouvoir se retrouve devant une impasse. Il propose de dialoguer tout en affirmant ne rien vouloir lâcher, ce qui dissuaderait tout interlocuteur potentiel d’aller perdre son temps en discussions.
Le triste sire à la tête de l’état démontre qu’il n’a rien compris en affirmant toujours qu’il n’est pour rien dans la situation actuelle et qu’il est la solution, alors qu’il est le problème. En laissant pourrir le conflit, il l’a conduit à se radicaliser et il s’est coupé des voies de repli honorable qui existaient encore il y a peu. Lui seul peut dénouer cet imbroglio à présent en posant un geste fort et symbolique qui démontrerait qu’il tient enfin compte des aspirations populaires. Il doit arrêter de prétendre dialoguer avec des représentants qui n’en sont pas, et qui ne le seront jamais, car ils ne le souhaitent tout simplement pas. Ce mouvement est parti de la base, il refuse d’être récupéré, il ne fait aucune confiance à qui que ce soit et l’on ne peut pas l’en blâmer. Le président doit s’adresser à tous, et directement, mais pas pour son enfumage habituel, pour proposer de véritables concessions en faveur du pouvoir d’achat, qui reste au cœur des revendications.