Hiver être froid

Vous connaissez cette blague sur le trappeur blanc qui revient de sa corvée de bois pour l’hiver et qui entend le vieil indien déclarer sentencieusement : « hiver être froid ». Confiant dans la sagesse millénaire des aborigènes, il retourne faire une nouvelle coupe et s’attire un : « hiver être très froid » en retour. Et le jeu continue jusqu’à ce qu’il demande au sage sur quoi il base son analyse. Le sachem réplique alors : « quand homme blanc couper beaucoup de bois, hiver être très froid ».

Le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat peut, au choix, donner froid dans le dos, ou faire transpirer les citoyens du monde chargés de contenir le réchauffement climatique dans des limites acceptables. Rappelons que les pays signataires de l’accord à la Cop 21 de 2015 à Paris se sont engagés à ne pas dépasser une augmentation de la température moyenne d’un degré et demi. Depuis lors, les États-Unis se sont désengagés et beaucoup de pays traînent les pieds sur la mise en œuvre de mesures concrètes. Autant dire que l’objectif est très loin de devenir accessible. Il faudrait pour cela, non seulement freiner l’augmentation des gaz à effet de serre, mais amorcer un mouvement de véritable diminution de ces émissions. Faute de quoi, à la fin du siècle, le réchauffement serait plutôt de 3 degrés, avec des conséquences catastrophiques.

Que faire ? nous pouvons, comme Jacques Chirac en 2002 à Johannesburg, déclarer solennellement : « notre maison brûle et nous regardons ailleurs. » Beau discours, écrit par un écologiste authentique, mais dont l’efficacité a été toute relative. Nous pouvons aussi, et ce n’est pas négligeable, fermer le robinet pendant que nous nous brossons les dents. Et également éviter le gaspillage sous toutes ses formes. C’est ce que Pierre Rabbi défend avec sa théorie du colibri qui contribue à éteindre l’incendie en luttant à son niveau avec ses faibles moyens, en faisant sa part. Soyons clairs. La somme des initiatives individuelles, si elle est utile pour faire progresser les consciences, ne peut pas, à elle seule, avoir un impact décisif sur les grands équilibres mondiaux. 71 % de la pollution provient de l’activité industrielle. Pour des résultats significatifs, il n’est pas besoin de chercher très loin. Mais les chiffres peuvent parfois amener à conclusions inacceptables. La mesure qui permettrait la plus importante économie de CO2 sur le long terme consisterait à ne plus avoir d’enfants, ou en avoir moins. Ce qui a aussitôt attiré des commentaires sur Internet demandant quel enfant sacrifier en premier. Il faut bien quelques musiciens pour jouer pendant le naufrage du Titanic.