John Emerich Edward Dalberg-Acton
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 7 septembre 2017 10:09
- Écrit par Claude Séné
Vous ne le connaissez peut-être pas, mais il y a beaucoup de chances que vous ayez déjà entendu ou lu sa célèbre formule : « Le pouvoir tend à corrompre, le pouvoir absolu corrompt absolument ». Quand les hommes (ou les femmes) sont dans l’opposition, ils sont généralement plus prompts à dénoncer les injustices et à fustiger les puissants de ce monde, que lorsqu’ils sont eux-mêmes aux commandes. Une nouvelle preuve nous en est administrée par l’attitude d’Aung San Suu Kii, prix Nobel de la Paix en 1991, qui dirige actuellement la Birmanie.
Enfin, elle la dirige, certes, mais sous le contrôle de l’armée, et ceci explique sans doute cela. Il y a actuellement une crise humanitaire dans son pays au sujet de la minorité musulmane des Rohingyas, victimes d’une véritable épuration ethnique, puisque 30 % d’entre eux ont déjà fui le pays après la répression militaire qui les a durement touchés. La communauté internationale s’est émue de cette situation, et la cheffe de l’exécutif birman a même subi l’humiliation d’être rappelée à l’ordre par son homologue turc, Erdogan, qui ne brille pourtant pas particulièrement en ce moment dans le domaine des droits de l’homme. Ces droits pour lesquels elle s’est battue avec acharnement, assignée à résidence ou emprisonnée pendant de longues années. Son silence et sa passivité devant les exactions commises par les militaires ont étonné sa jeune consœur pakistanaise en Nobel, Malala Yousafzai, qui la supplie de prendre position au plus vite. Il y a de grandes chances qu'Aung San Suu Kii se soit persuadée qu’elle était plus utile à son pays en continuant d’exercer une part du pouvoir, quitte à ne pas réussir à faire passer toutes ses idées d’autrefois, plutôt que de se démettre de ses fonctions, encouragée en cela par un entourage complaisant. Car en plus de corrompre, le pouvoir a tendance à altérer les capacités de jugement, à faire perdre pied avec la réalité et le contact avec le terrain.
Toutes choses de nature à faire s’accrocher les dirigeants au pouvoir en perdant la lucidité nécessaire pour l’exercer dans le respect de leurs convictions, si toutefois on en possède au départ, ce dont il est parfois permis de douter. Peu de politiques ont le courage de se retirer lorsqu’ils en ont l’occasion. Leurs chances de retour ont beau être minces, ils s’accrochent désespérément, quitte à faire le combat de trop. Valéry Giscard D’Estaing n’a jamais renoncé, malgré ses échecs répétés, Sarkozy ne s’est arrêté que contraint et forcé, et j’entends dire que François Hollande, sorti par la petite porte, aimerait bien revenir par la grande fenêtre de sa fondation. Un peu de décence ne nuirait pas, si ?