Le prêche dans le désert

À trois, je reconnais l’état palestinien ! Emmanuel Macron a lancé le décompte en avril dernier dans un courrier adressé au président de l’Autorité palestinienne. Et de « un » ! Il a confirmé son intention en juin et devait en faire l’annonce pendant la Conférence internationale sur le règlement pacifique de la question de Palestine, évènement annulé pour cause de frappes sur l’Iran. Et de deux ! L’acte trois devrait être officialisé en septembre prochain lors d’une Assemblée générale des Nations unies à New York. À moins que nous ayons droit à de nouvelles tergiversations présidentielles. Deux et demi ! Deux trois quarts ! Dans l’espoir de rallier d’autres pays à notre cause.

La France sera le 149e pays sur les 193 que compte l’ONU à reconnaître l’état palestinien. Il s’agit donc d’un désert tout relatif, mais elle compte parmi les nations membres du G7, dont elle serait la première à sauter le pas. À supposer que la presque totalité des pays membres de l’ONU finisse par reconnaître l’état palestinien, l’adhésion du pays comme entité à part entière serait bloquée par les États-Unis qui disposent d’un droit de veto au Conseil de sécurité et en ont d’ailleurs fait usage en 2024. Par ailleurs, la reconnaissance mutuelle des deux états qui peuplent la région est une condition nécessaire, mais non suffisante pour espérer obtenir un jour une coexistence pacifique des populations dans une solution dite « à deux états », similaire à celle qui résultait des accords d’Oslo, avant que le Premier ministre Yitzhak Rabin soit assassiné par un extrémiste israélien. La coalition très marquée à droite au pouvoir actuellement en Israël a bien entendu critiqué sévèrement la position de la France, qu’elle accuse de donner une prime au terrorisme qu’elle a largement contribué à faire prospérer par sa politique guerrière et colonisatrice.

On reproche beaucoup et à juste titre à la Russie de Poutine de ne pas tenir compte de l’opinion publique et du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes en s’emparant des territoires dont elle considère qu’elle en a besoin pour assurer sa sécurité. Israël ne fait pas autre chose en déclenchant des guerres préventives, ou en s’installant sur les terres qu’il convoite au nom d’une lecture littérale de la Bible. Ils sont soutenus en cela par Donald Trump, dont il apparait de plus en plus clairement que les ambitions territoriales apparemment fantaisistes sont à prendre tout à fait au sérieux. Dans ce contexte, la prise de position d’Emmanuel Macron va naturellement dans le bon sens. On ne peut que s’étonner du luxe de précautions qui entoure une décision qui aurait dû être prise depuis longtemps et qui apparait comme une évidence.