Trompe-l’œil
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 8 mai 2017 11:02
- Écrit par Claude Séné
La défaite de Marine Le Pen ne souffre d’aucune contestation, bien que le Front national ait fait son score historiquement le plus haut en rassemblant plus de 10 millions de votants sur son nom. Elle aura bénéficié du report des voix d’un certain nombre d’électeurs déçus de l’échec de François Fillon, qui auront trouvé le rose très pâle de Macron encore trop vif à leur goût, comme le moindre rayon de soleil offense la vue d’un comte Dracula. Par voie de conséquence, Emmanuel Macron réalise un score flatteur auprès des deux tiers des électeurs qui ont exprimé leurs suffrages.
66 %, c’est beaucoup. Cela représente plus de 20 millions d’électeurs. Nous sommes cependant loin des 82 % du Front républicain réunis pour faire barrage à Jean-Marie Le Pen en 2002, et cela malgré les appels des principales formations politiques à voter Macron, par raison plus que par conviction. Beaucoup de Français ont cependant traîné les pieds, soit en n’allant pas voter, soit en votant blanc ou nul. L’abstention a atteint un niveau inédit depuis 1969, où le « choix » s’était résumé entre Pompidou, bonnet blanc du capitalisme triomphant, et Poher, blanc bonnet de la bourgeoisie conformiste, tandis que la gauche divisée ne franchissait pas le premier tour. Fait frappant, l’abstention a progressé entre les deux tours, signe de rejet d’une offre insatisfaisante. Le président nouvellement élu devra tenir compte également du pourcentage record de votes blancs et nuls, plus de 4 millions d’électeurs, soit 9 % des inscrits. Du jamais vu, et qui doit faire réfléchir, même si ces bulletins ne sont pas comptabilisés dans les pourcentages. Il serait abusif de totaliser les 25 % d’abstentionnistes et les 9 % de votes blancs ou nuls, mais si l’on considère que beaucoup d’électeurs n’ont glissé le bulletin Macron dans l’urne que pour empêcher Marine Le Pen d’accéder au pouvoir, on mesure combien la base électorale du président élu est fragile.
D’ailleurs, selon un sondage réalisé au soir des résultats, 61 % des Français ne souhaiteraient pas qu’il obtienne une majorité absolue aux législatives prochaines, ce qui semble conforme au vote du 7 mai. Si le candidat à présent élu a semblé prendre la mesure de cette hypothèque et avoir conscience de la difficulté de la tâche qui l’attend, certains de ses soutiens n’ont pas hésité à s’attribuer abusivement une « adhésion » des Français aux points les plus contestables de son programme, notamment la réorganisation du marché du travail, qu’il compte mettre en œuvre aux forceps des ordonnances et si nécessaire à coups de 49.3. Le résultat des législatives sera donc capital pour protéger les Français des régressions sociales.