La foire du Trône

Winston Churchill affirmait que « la démocratie est le pire des systèmes, à l’exclusion de tous les autres. » Il faut cependant reconnaître que la monarchie présente un gros avantage sur la démocratie, et c’est celui de définir à l’avance un ordre de succession précis, qui permet de lever toute incertitude sur la personne qui sera chargée d’exercer le pouvoir, lorsque le roi ou la reine en titre sera dans l’incapacité d’assurer ses fonctions pour une raison quelconque, la plupart du temps pour cause de décès, prématuré ou tardif. Il ne faut d’ailleurs pas cacher les inconvénients de ce régime, en cas de longévité excessive du titulaire, qui condamne le successeur à devoir patienter éternellement comme Charles III pour porter enfin la couronne d’Angleterre.

Faute de ce pouvoir héréditaire, les prétendants à la place la plus prestigieuse de l’état, j’ai nommé la présidence de la République, en sont réduits à faire des pieds et des mains très longtemps à l’avance pour se faire remarquer et persuader les Français qu’ils sont les mieux placés pour faire le job. C’est ainsi que les spéculations les plus hasardeuses vont bon train sur les chances respectives de telle ou telle personnalité, alors que les élections présidentielles n’auront lieu que dans deux ans. Pour être honnête, la course aux investitures a commencé depuis longtemps, à vrai dire dès le résultat connu de la précédente élection, si ce n’est avant. Pour exemple, l’ancien Premier ministre Édouard Philippe ne fait aucun mystère de ses ambitions, affichées depuis son départ de Matignon. D’autres, comme Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon, se considèrent comme candidats de droit, à l’ancienneté, sans aucune légitimité particulière.

Et c’est là où le bât blesse. De même que tout soldat de deuxième classe possède dans sa giberne l’espoir d’un bâton de maréchal, les conditions nécessaires pour se présenter à la fonction de président de la République française ne sont pas si difficiles à remplir que l’on échappe à des candidatures « spontanées » plus ou moins inattendues. Pour exemple, l’actuel président était peu connu des Français avant de se glisser au deuxième tour par un trou de souris au nez et à la barbe des partis traditionnels et bénéficier d’un rejet de greffe du Rassemblement national, comme Chirac en 2002. À peine Bruno Retailleau plébiscité à la tête d’un parti de la droite traditionnelle qu’on le voit déjà à l’Élysée. Il devra cependant d’abord s’imposer devant des candidats improbables tels que Michel-Édouard Leclerc, ou Teddy Riner, dont je me garderai bien de dire du mal étant donné notre différence de gabarit. Ce qui est remarquable, c’est que ni l’un, ni l’autre, ne démentent formellement cette hypothèse, et se juge apparemment tout à fait capable d’assumer cette fonction. Et peut-être ne feraient-ils pas pire, à condition d’être bien conseillés, et d’avoir l’humilité de s’informer.