Sus aux impôts !

Au détour d’une phrase apparemment anodine, le candidat président Emmanuel Macron a annoncé froidement la fin des impôts, sans plus de précisions, ce qui m’a plongé dans un abîme de perplexité. Sans impôts, l’état se trouverait privé de ressources, au moment même où il en a le plus besoin, après avoir dépensé sans compter, c’est le cas de le dire, quoi qu’il en coûte, pour soutenir l’économie mise à l’arrêt par l’épidémie du Covid, et avant de devoir supporter le choc de la crise liée à l’invasion de l’Ukraine par la Russie et les sanctions qui en découlent.

Le président s’appuie sur un précédent qu’il a lui-même créé : celui de la disparition progressive de la taxe d’habitation pour proposer la suppression de la redevance audiovisuelle. À première vue, dans un cas comme dans l’autre, le pouvoir en place joue sur du velours. Qui pourrait s’opposer à recevoir un cadeau fiscal, même si la ficelle est un peu grosse ? Mais l’argent magique n’existant pas réellement, l’état a dû s’engager à rembourser aux communes le manque à gagner de la taxe supprimée, « à l’euro près », comme il est d’usage de le dire avant de piétiner gaiement cet engagement. Il pourrait en aller de même de la redevance qui serait compensée par une ligne budgétaire. Un tour de passe-passe purement démagogique, qui coûtera environ 3 milliards et demi financés par les contribuables, d’une manière ou d’une autre. Puisqu’à l’évidence l’état ne peut pas se priver de toutes ses recettes, même si l’on nous ressert toujours la vieille antienne d’une nécessité de mieux gérer les dépenses de l’état et de réaliser des économies, par exemple, au hasard, en diminuant le nombre de fonctionnaires, chacun sait que les dépenses liées à la santé, l’éducation et tous les secteurs régaliens, sont vouées à augmenter sous peine d’un délabrement déjà commencé et qui pourrait être aggravé par le retour de l’inflation.

On peut en déduire que le sous-texte de la suppression des impôts, promise par le candidat Macron, est à comprendre comme très sélective. Par exemple, l’impôt sur la fortune, déjà très amputé par le président des riches et réduit à son volet de patrimoine immobilier, pourrait disparaître totalement. En revanche, pas un centime ne devrait être déduit de la contribution indirecte des citoyens quand ils achètent du carburant pour rouler ou pour se chauffer. De même, les gros salaires pourront toujours lever le doigt sans prendre de gros risques, il suffira d’être bien conseillé pour dissimuler ses ressources, comme maintenant. La recette principale devrait rester la TVA, l’impôt le plus injuste qui soit, s’appliquant uniformément et aveuglément aux pauvres et aux riches, mais aussi le plus indolore, la plupart des consommateurs ne tenant compte que du prix toutes taxes comprises.