Delevoye : au rapport !

Ayé ! le Monsieur retraite chargé de la délicate mission de faire des propositions au gouvernement, après une longue phase de consultations, a remis solennellement son rapport au Premier ministre, qui l’a accepté en faisant semblant de tout ignorer de son contenu. À croire qu’Édouard Philippe ne lit pas les journaux, n’écoute pas la radio, ne regarde jamais la télévision et se garde bien de consulter Internet. Car les dispositions envisagées pour modifier les régimes de retraite sont sur la table depuis fort longtemps et sont donc tout sauf une surprise.

Enfin, si, il y a une petite surprise. Jean-Paul Delevoye avait prévenu le pouvoir que, lui vivant, il était hors de question de toucher à l’âge de départ en retraite, fixé jusqu’ici à 62 ans. Il m’a paru cependant en pleine santé alors que l’âge effectif de la retraite à taux plein devrait reculer de deux ans, pour l’instant, et plus si affinités. C’est peut-être ce qui explique que le gouvernement a accueilli son rapport avec une chaleur qui contraste vivement avec la froideur glaciale réservée à Jean-Louis Borloo quand il avait remis le sien sur la politique de la ville l’an dernier. Mr Delevoye est un homme poli, qui a pris soin de n’écrire dans son rapport que ce qui agrée au président, tout en se tenant prêt à assumer l’impopularité éventuelle de certaines mesures. Voilà ce que j’appellerai un grand serviteur de l’état, dont on dit qu’il pourrait récupérer un maroquin ministériel au prochain remaniement, ce qui ne serait vraiment pas volé.

Le système de retraite en France est basé sur la répartition. Ce sont les salariés qui travaillent qui payent les retraites des inactifs. Il n’y aurait donc que trois solutions pour tenir cet équilibre instable. Augmenter les cotisations des actifs, diminuer le montant des retraites servies ou retarder le départ en jouant sur la durée de cotisation. Ah ! oui, il y aurait bien une quatrième option, mais le patronat s’y opposera avec la dernière énergie, ce serait d’augmenter la participation des entreprises. Vous remarquerez que le MEDEF de Geoffroy Roux de Bézieux soutient le projet gouvernemental et je vous laisse en tirer les conclusions qui s’imposent. La grande idée de la réforme serait une simplification du mode de calcul de la retraite : à chaque euro cotisé correspondra un nombre égal de points, quel que soit le statut du salarié. Une règle tellement simple que l’on est obligé de la compléter par un nombre incalculable de dispositions pour tenir compte des cas particuliers : bonifications pour des périodes non travaillées, pour les enfants, pour la pénibilité, etc. tout ça pour habiller d’un semblant de justice sociale une réforme qui veut tout simplement payer moins et moins longtemps les retraités.