La crise du bio
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 6 décembre 2022 10:48
- Écrit par Claude Séné
Les produits issus de l’agriculture biologique, après une longue période de progression continue, n’ont plus autant la cote auprès des consommateurs, la faute à l’inflation galopante, qui ampute les budgets des ménages en général, et amène la frange la moins aisée à arbitrer entre les dépenses. À ce compte-là, le consommateur va rogner sur les prix et tenter de limiter la hausse du budget d’alimentation en descendant en gamme. Au lieu d’acheter des légumes bio par exemple, il va se contenter de légumes produits plus industriellement, mais qui coûtent moins cher. Même en procédant ainsi, les produits de première nécessité devraient augmenter d’environ 20 %, ce qui est énorme.
Malgré la compensation des produits moins courants, comme l’électroménager, qui augmentera moins, mais un peu quand même, l’inflation, qui est contenue en France aux environs de 6 %, devrait se stabiliser au cours de l’année 2023. Pour ce qui concerne spécifiquement le bio, la situation est préoccupante. La conversion de nombreux agriculteurs en France aux critères de l’agriculture biologique, et le remplacement des intrants chimiques par un travail effectué manuellement a bien fonctionné jusqu’à une époque récente. Le coût de la main-d’œuvre supplémentaire était compensé par un prix de vente accepté par le consommateur, soucieux d’une alimentation plus saine. On pouvait simplement observer un côté élitiste et injuste socialement, les plus pauvres étant écartés de ce marché. Même avant la crise liée au renchérissement de l’énergie et à la pénurie de certaines matières premières, la logique du bio s’est heurtée à celle de l’empreinte carbone. Importer des produits depuis l’autre bout du monde, même en bio, était-il soutenable par rapport à d’autres, élevés sur place ?
Le local est en passe de devenir le critère essentiel, par exemple dans les cantines scolaires. Naturellement, si l’on peut concilier les trois objectifs : des produits bio, locaux et bon marché, c’est encore mieux. On privilégiera les circuits courts, par exemple le système des AMAP, les associations pour le maintien d’une agriculture paysanne, qui proposent un abonnement à des « paniers » dans lesquels on retrouve des produits de la ferme. Il existe aussi des ventes directes plus ou moins importantes pour écouler la production, sans payer d’intermédiaires. Le succès de ces formules, qui semblent mieux résister à la crise que le bio pur et dur distribué dans des filières plus classiques, tient aussi à un facteur essentiel : la qualité gustative. À titre personnel, c’est l’épreuve du palais qui est la pierre de touche de la satisfaction que l’on peut retirer de la nourriture. Une simple tomate, bien mûre, dégustée pendant la saison à la croque-au-sel, peut être un met de roi. Et pourtant elle est parfois difficile à trouver, à moins de pouvoir la faire pousser soi-même.