Bonus-malus
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le jeudi 22 septembre 2022 10:44
- Écrit par Claude Séné
Et revoilà la réforme des retraites ! Les Français avaient manifesté clairement leur désaccord sur cette réforme dans sa première mouture. La retraite par points manquait visiblement son objectif d’universalité et de justice sociale prôné par son inspiratrice, la CFDT, et l’on pensait le sujet mort et enterré, car beaucoup trop sensible pour un gouvernement ne disposant pas d’une majorité absolue au parlement. Mais le projet mis à la porte avec pertes et fracas, Macron veut le faire rentrer par la fenêtre dans une version presque pire que la première en s’attaquant principalement à l’âge de départ et à la durée de cotisations.
Paradoxalement, le Président veut présenter son texte le plus rapidement possible, au prétexte qu’il ne sera pas mieux accueilli plus tard, alors que le régime des retraites est pour le moment excédentaire. Il annonce cyniquement qu’il espère financer ainsi des dépenses sur l’autonomie et la fin de vie, qui méritent un effort national sans obliger les Français à travailler plus longtemps. L’argument massue des partisans de la réforme, c’est l’allongement de l’espérance de vie. En 2020, il était de 85 ans pour les femmes et de 79 ans pour les hommes, mais le diagnostic est à affiner. Sinon, il faudrait condamner les femmes à travailler plus longtemps que les hommes, puisqu’elles vivent 6 ans de plus en moyenne. Une sorte de bonus-malus en quelque sorte. Pour nuancer le constat, beaucoup d’économistes invoquent une autre statistique, celle de l’espérance de vie en bonne santé, qui fait retomber la moyenne à 64 ou 65 ans, selon le sexe, c’est-à-dire pile-poil l’âge envisagé pour partir en retraite dans le futur système. En caricaturant à peine, on partirait en retraite au moment où les ennuis de santé commencent, toujours en moyenne, bien sûr.
Cet indicateur de « bonne santé » est assez difficile à établir et ne distingue que l’âge et le sexe. Il ne tient pas compte des données des personnes résidant en EHPAD, qui feraient sûrement baisser la moyenne, et surtout n’intègrent pas les différences liées aux catégories socioprofessionnelles. Car c’est un des principaux reproches que l’on peut faire à une réforme aveugle qui ne tiendrait pas compte notamment de la pénibilité des carrières. « 20 ans au charbon, c’est un peu minant », chantait Renaud avec à propos, et ce n’est qu’un exemple. Reste aussi à établir ce que l’on appelle une vie en bonne santé. Le concept est un peu flou, et d’aucuns lui préfèrent celui de vie sans incapacité, plus facilement objectivable. Tous s’accordent à dire que l’une ou l’autre de ces appellations recouvre une réalité indiscutable, et qu’il faut individualiser au maximum les conditions permettant à chacun de profiter de la vie après l’activité professionnelle lorsqu’il en décide ainsi et qu’il a cotisé pour cela. La question mérite au moins un débat.