À la tête du client
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 12 avril 2022 10:49
- Écrit par Claude Séné
À peine qualifié pour le second tour, le candidat président s’est empressé de désavouer le président candidat en revenant sur une des mesures qu’il avait mises en avant pour s’assurer les faveurs de l’électorat traditionnellement attaché à la droite républicaine. La retraite à 65 ans, dont il faisait alors un pilier indispensable sous peine d’une banqueroute du système par répartition après avoir dit le contraire pendant tout son quinquennat, devient une simple variable d’ajustement, qu’il serait tout à fait possible de négocier. C’est dire la puissance et la force des convictions d’un personnage prêt à tout pour être réélu.
Avec un cynisme même pas déguisé, Emmanuel Macron a siphonné les voix de la droite traditionnelle, dont il a incarné de plus en plus explicitement les valeurs au cours de son quinquennat en réduisant à peau de chagrin le rôle de ses supplétifs issus de la gauche caviar ou de l’écologie opportuniste. Cependant, il se rend bien compte qu’il a besoin d’une partie des électeurs qui se sont portés sur Jean-Luc Mélenchon pour réussir ce nouveau hold-up. Il sait que beaucoup d’entre eux sont réticents, voire hostiles, à le soutenir après ces cinq années repoussoir, que les Français ont subies à leur corps défendant. Parmi les « réformes » qui ont été imposées aux citoyens de ce pays, qui n’en demandaient pas tant, la retraite est peut-être celle qui a soulevé le plus de critiques et de craintes légitimes, au point de conduire le président à la reporter pour ne pas dire l’abandonner purement et simplement. Après cette défaite en rase campagne, la sagesse aurait voulu que le candidat Macron évite d’évoquer le sujet dans son programme, mais le goût du jeu et de la provocation a été le plus fort.
C’est apparemment sciemment que le candidat, qui n’a annoncé presque rien de ses intentions, si ce n’est d’aggraver les dispositions actuelles, a décidé d’agiter le chiffon rouge de la retraite à 65 ans. Les électeurs de premier tour qu’il a ainsi débauchés ne changeront probablement pas leur vote au deuxième tour, et il espère que ceux qui ont voté Mélenchon seront attirés par une concession sur l’âge, en cédant 1 ou 2 annuités, qui seront rattrapées à la première occasion. Pour ma part, je doute fort de l’efficacité d’une telle stratégie, mais il devra peut-être son salut à la répugnance envers l’extrême-droite en général, encore plus forte que la détestation dont il est l’objet à titre personnel. Plus pragmatique que cette mesurette de façade, il pourrait faire distribuer dans tous les bureaux de vote de France et de Navarre des épingles à linge destinées aux électrices et aux électeurs qui désireraient se boucher le nez au moment de déposer leur bulletin dans l’urne.