La jeune fille et la mort

Ce thème universel a donné lieu à diverses variations artistiques, des toiles, des musiques, une pièce de théâtre, un film… Ce qui s’est passé cette semaine à Lille est une déclinaison tragique de cette allégorie. Car la jeune fille en question, âgée de 17 ans, née dans un corps de garçon, s’est donné la mort, après un conflit lié à l’acceptation de son identité par les autorités du lycée où elle était scolarisée en terminale. Elle avait fait l’objet d’un renvoi temporaire parce qu’elle s’était présentée en jupe à son lycée.

Dans l’état actuel de l’enquête, on ne peut pas affirmer avec certitude que son suicide ait été causé directement par cette sanction. Fouad devait vivre un quotidien très difficile, elle qui était hébergée dans un foyer de l’aide sociale à l’enfance et qui devait être en butte à l’incompréhension de la plupart des adultes. Elle avait filmé son entrevue avec la conseillère principale d’éducation et elle l’avait postée sur les réseaux sociaux. Le témoignage est accablant. La CPE y affirme qu’elle la comprend, mais sur un ton qui vaut toutes les engueulades du monde. En substance, on comprend que le lycée souhaiterait que Fouad fasse profil bas et ne donne pas de prétexte à une transphobie localisée chez les autres. On reconnait bien là la politique recommandée par la hiérarchie en toutes circonstances : « pas de vagues ! » C’est d’autant plus stupide qu’il ne semble pas y avoir eu de harcèlement de la part des autres élèves, qui, s’ils ne la connaissaient pas forcément personnellement, acceptaient sans problème sa différence. Un mouvement de sympathie et de compassion est d’ailleurs né spontanément dans le lycée.

En écoutant la surveillante, qui se juge probablement bienveillante, on mesure le chemin qui reste à parcourir dans l’éducation nationale, à l’image de la société globale, dans l’acceptation des différences. Son absence d’empathie, pour ne pas dire son hostilité et son agressivité vis-à-vis de l’élève qui n’a que le tort d’exister, démontre à quel point l’institution est inadaptée à ceux qui dévient un tant soit peu de la norme. Le ministre de l’Éducation aura beau se défendre en prétendant faire beaucoup contre le harcèlement, y compris à l’égard des élèves dits LGBT, il doit admettre que les résultats ne sont pas à la hauteur. Quels sont les moyens concrets mis en place par l’institution pour la prise en charge des détresses psychologiques dans le cadre scolaire ? Pour les enfants du premier degré, je peux vous répondre : ils sont dérisoires. Avec des taux de médecins scolaires, d’assistantes sociales, de psychologues notoirement insuffisants. Et dans le second degré, à l’âge de l’adolescence propice aux grands bouleversements et aux passages à l’acte, c’est pire. Et ce n’est pas en ces temps d’épidémie que l’on peut espérer une amélioration.

Commentaires  

#1 jacotte 86 19-12-2020 10:58
il faut désespérément chercher des raisons de de se réjouir de ce futur Noël!
Citer