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Les nouveaux enragés
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 19 juin 2020 10:27
- Écrit par Claude Séné
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Alors que l’on célèbre l’homme du 18 juin 1940, on oublie celui qui incarna l’ordre patriarcal après avoir bafoué les institutions républicaines en s’emparant du pouvoir en 1958 pour s’opposer à un putsch militaire téléguidé pour permettre son retour. Il fera régner pendant 11 longues années une chape de plomb sur une société française corsetée par le respect figé de valeurs dépassées. Dans une magnifique dénégation, digne d’être citée dans tous les manuels de psychanalyse, il s’écriait alors : « pourquoi voulez-vous qu’à 67 ans je commence une carrière de dictateur ? » Par orgueil, peut-être ?
Quelles qu’en soient les raisons, la cocotte-minute allait accumuler sa vapeur jusqu’au point de non-retour et finir par exploser dans la révolte quasi révolutionnaire de mai 1968. À l’époque, un certain Dany, surnommé le Rouge, prenait la tête d’un mouvement dont les membres se disaient eux-mêmes « les enragés de Nanterre ». Vous aurez peine à le reconnaitre aujourd’hui sous les traits d’un conservateur vaguement écologiste, plus féru de football que de luttes sociales. Si ces jeunes gens étaient si remontés, c’est qu’il n’y avait aucune soupape de sécurité pour évacuer le trop-plein de frustration et l’exaspération devant une société qui ne les comprenait pas. Le pouvoir gaulliste agissait comme une fabrique d’enragés, et je me demande si les choses ont tellement changé.
Comment expliquer autrement qu’une infirmière, au comportement exemplaire pendant l’épidémie de ces derniers mois, où, comme bon nombre de ses collègues, elle n’a pas ménagé sa peine et ses efforts, contractant elle-même la maladie, en soit arrivée à lancer des pierres sur les policiers et à leur faire des doigts d’honneur ? Tout ceci au cours d’une manifestation dont l’objet n’aurait jamais dû être nécessaire. Jusqu’au président de la République qui reconnait que la profession est mal rémunérée, alors que lui-même n’a rien fait pour améliorer leur situation depuis qu’il est au pouvoir et que l’on fait lanterner les soignants dans des pseudo négociations où l’on parle de tout sans aucun résultat concret. Et voilà comment on fait d’une paisible presque quinquagénaire une cible idéale pour des policiers exaspérés, se vengeant de leurs difficiles conditions de travail sur ceux qui sont là pour les soigner, eux qui devraient les protéger.
Ce n’est pas la première fois que le pouvoir macronien est confronté à la violence qu’il a lui-même contribué à créer, ou qu’il n’a pas su désamorcer. Le mouvement des gilets jaunes n’est pourtant pas si vieux et le président n’en a rien appris. Il ne suffit pas de sortir le chéquier pour résoudre les problèmes. Encore faut-il l’utiliser à bon escient et en faveur de ceux qui en ont le plus besoin. Les manifestants pourraient utiliser ce slogan : pas de paix sociale sans justice sociale.