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Privation de liberté
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mardi 24 mars 2020 10:57
- Écrit par Claude Séné
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Ne dites plus prison, ou zonzon. En novlangue, on parle de « lieu de privation de liberté ». On a même créé une fonction de contrôleur général de ces lieux, principalement des établissements pénitentiaires, actuellement occupée par la magistrate Adeline Hazan. On est en droit de se demander si les mesures de confinement, dont le Premier ministre vient de durcir les règles, ne sont pas, d’une certaine façon, comparables à une incarcération, dans la mesure où elles sont une entrave évidente à la liberté d’aller et de venir à sa guise.
Je sais ce que vous allez me dire, et vous aurez raison. Quand on n’a pas soi-même été emprisonné, il est difficile de ressentir la situation « de l’intérieur ». Cependant, pour y avoir travaillé, je sais un peu ce que représente la vie dans un espace carcéral. En principe, les peines encourues par les auteurs de crimes ou délits graves ne doivent être que des privations de liberté, à l’exclusion de toute autre sanction. En pratique, le milieu carcéral engendre mécaniquement d’autres épreuves, telles que la promiscuité dans des cellules surchargées du fait de la surpopulation pénale. L’isolement peut parfois être un luxe, mais aussi un supplice lorsqu’il est total. Un détenu dispose d’une denrée rare à l’extérieur : le temps. Il peut l’utiliser pour travailler, si l’établissement le permet et afin de pouvoir « cantiner », ou s’instruire, passer des examens ou apprendre une spécialité. Il reste à la merci de l’administration pénitentiaire, qui peut ajouter la privation de dignité à la privation de liberté.
En comparaison, le confinement qui nous est imposé semble plutôt confortable, comme une sorte de bracelet électronique qui nous imposerait de rester à proximité immédiate du domicile. Certes. Mais tout se passe dans la tête. On a parlé, à tort, de prisons 4 étoiles pour des établissements récents, ou de quartiers VIP destinés aux délinquants de haut vol, parce qu’ils disposaient d’éléments de confort matériel tels que la télévision. Il faut cependant parfois une heure pour parcourir les quelques mètres qui séparent le parloir de la cellule. Quand on se représente la prison, on a parfois l’image d’un Edmond Dantès cochant les jours sur le mur de sa cellule. Ce qui est minant dans le confinement, c’est de ne pas savoir combien de temps il peut durer. Non seulement une réduction de peine est exclue, mais plus le temps passe, plus on en rajoute dans le quantum, et plus on durcit les conditions, sans forcément y apporter plus de logique. Les lieux à risque, tels que les commerces de bouche ou certaines entreprises jugées indispensables, continuent à fonctionner malgré le manque criant de protections, tandis que les particuliers devront faire seuls leur jogging, devenu une sorte de « promenade » similaire à la cour d’une prison, dans un objectif purement hygiénique.
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