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Les déserteurs
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 21 mars 2020 10:36
- Écrit par Claude Séné
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Si je faisais partie des conseillers qui ont « l’oreille » du président de la République, je lui donnerais pour avis de ne pas placer la lutte contre le coronavirus sur le terrain de la morale comme le font toujours les autorités depuis que le monde existe. Et pour ne pas tomber moi-même dans le travers que je voudrais dénoncer, ce ne serait pas au nom d’un quelconque jugement de valeur, mais pour une raison d’efficacité et dans un but pragmatique.
En effet, depuis que le président a décrété que nous étions en guerre, il a pu constater qu’il y avait de nombreux déserteurs, qui n’ont pas attendu un nouveau Boris Vian pour les inciter au refus. L’argumentation officielle pour justifier les mesures de confinement tient essentiellement à deux considérations morales : d’une part, si vous ne tombez pas malade, vous faciliterez la tâche des soignants, qui risquent d’être débordés, alors qu’ils font un travail acharné. D’autre part, en sortant de chez vous ou en ne prenant pas les précautions d’usage, vous mettez en danger le reste de la population. Je suis désolé, mais il faut bien constater que cela ne marche pas. Nous en faisons l’expérience depuis quelques années avec une méfiance massive à l’égard des vaccins en général, et celui de la grippe en particulier. À mon avis, l’argument le plus susceptible de convaincre les Français des bonnes pratiques en matière de contagion n’est pas en premier lieu un raisonnement altruiste, mais égoïste.
Rester chez soi autant que faire se peut est le meilleur moyen de ne pas attraper soi-même le virus et de risquer inutilement sa vie ou celle de ses proches. La résistance passive dont font preuve certains de nos compatriotes ne peut venir que d’une méconnaissance des dangers réels liés à l’épidémie. Il leur manque une frousse salutaire pour les inciter à rester à l’abri. Ce serait plutôt dans l’autre sens qu’il serait normal de devoir les convaincre. Pour persuader les personnes dont c’est le travail qu’ils doivent sortir quand on ne peut pas faire autrement. Que nous sommes chez nous dans une forteresse assiégée, dont on ne sort pas sans force précautions. Bien entendu, les enfants seront concernés et il faudra leur expliquer la situation, mais ils ne sont généralement pas les moins raisonnables. Les plus réfractaires seront probablement les adolescents qui vivent souvent dans l’illusion de l’immortalité et multiplient les comportements à risques. Je ne vois malheureusement pas d’autre alternative pour eux que la coercition pour limiter les écarts autant que possible. Tout ceci relève naturellement du vœu pieux, tant le président est persuadé d’avoir la science infuse et ne se sert des avis extérieurs que dans la mesure où ils confirment ses propres intuitions.