Colis piégé
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 20 février 2019 10:58
- Écrit par Claude Séné
Voici plusieurs jours que le chroniqueur que je suis tourne autour du sujet en hésitant à s’y engager. Il devrait aller sans dire que je condamne, comme presque tout le monde, les injures à caractère antisémite ou raciste, tout comme sexiste et homophobe d’ailleurs. Il n’y a pas de raison, sauf historique, d’établir une hiérarchie dans les discriminations. À cet égard, traiter de « sale pute » et non de « sale juive » comme on l’a cru dans un premier temps, l’ex-tête de liste de certains des gilets jaunes, n’est pas plus glorieux.
Dénoncer la bêtise, pour ne pas dire plus, des individus qui s’en sont pris à Alain Finkielkraut en prétendant représenter la France et le Peuple, rien de moins, ne doit pas justifier une récupération politique au nom d’un unanimisme de bon aloi. Personnellement, je n’adhère pas aux thèses du philosophe susnommé, dont je me fiche bien de la religion, et je n’entends pas que ma condamnation de ces imbéciles doublés de malveillants puisse être interprété comme un soutien à la politique du gouvernement israélien actuel, hostile à la paix. La profanation d’un cimetière à Quatzenheim, où 80 tombes juives ont été taguées de croix gammées, est une coïncidence qui rappelle l’origine idéologique nazie d’une partie de l’antisémitisme, sur laquelle une grande majorité de Français peut se retrouver dans une condamnation sans équivoque. Elle vient justifier a posteriori le rassemblement auquel a appelé le parti socialiste, rejoint par la plupart des formations politiques.
Je me souviens d’un sketch de Guy Bedos, où il imaginait que l’on posait la question à chaque citoyen pour savoir s’il était pour la paix ou pour la violence, et où il recevait une bonne gifle s’il prônait la violence, de même que s’il hésitait un peu trop longtemps sur la réponse à donner. Et Bedos est un bon exemple en matière d’antiracisme. Il a été obligé pendant un moment d’expliquer que lorsqu’il interprétait sur scène un personnage raciste, il ne défendait pas ses idées personnelles. Il a même enlevé de son spectacle un sketch sur le racisme, car le public applaudissait au mauvais endroit, imperméable au second degré. C’est qu’en la matière, il n’y a guère de place pour la nuance. Le raisonnement se doit d’être binaire : pour ou contre. Au point que même le parti de Marine Le Pen, qui a pourtant été porté sur les fonts baptismaux par l’idéologie révisionniste de son père, se décerne un brevet de défense contre l’antisémitisme. Ce qui ne l’empêche pas de désigner les salafistes comme les nouveaux boucs émissaires responsables de tous nos maux. On me permettra de refuser de faire front commun avec ces gens-là.