Mal de tête
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 12 octobre 2024 10:47
- Écrit par Claude Séné
Si les Français s’inquiètent à juste titre des effets secondaires que risque de leur amener un projet de budget élaboré en quatrième vitesse sur la table d’une arrière-cuisine électorale sous forme d’un casse-tête, ils pourraient bientôt avoir beaucoup de difficultés à soigner les maux de tête occasionnés par les fins de mois, surtout les 30 derniers jours. En effet, le laboratoire français Sanofi est en pleines négociations avec un groupe américain dans le but de lui céder sa filiale Opella, qui produit notamment le Doliprane, un médicament très populaire à base de paracétamol, qui représente à lui seul 8 % du chiffre d’affaires de l’entreprise.
Pourquoi alors se séparer d’une activité aussi lucrative, même en la monnayant aux environs de 15 milliards d’euros ? Pour faire encore plus de bénéfice, pardi ! le Doliprane, de même que la Lysopaïne ou le Maalox, pourrait être menacé par l’apparition de génériques, vendus 60 % moins cher, tandis que la recherche médicale progresse à grands pas et que les laboratoires mettent sur le marché des médicaments innovants et efficaces, mais hors de prix, pour le plus grand profit de leurs fabricants. Sanofi pourrait par exemple se concentrer sur des traitements très rentables, comme le Dupixent contre l’asthme, dont chaque injection est facturée 600 euros. Cette hyperfinanciarisation du secteur médical est choquante moralement, mais elle est surtout très dangereuse dans l’optique d’un accès égal aux soins, dont la dérive est patente et se renforce. La conséquence d’un développement anarchique dans ce secteur est nécessairement une concurrence acharnée entre les producteurs et également entre les clients du système. Certains pays, comme on l’a vu au moment de la pandémie du Covid-19, seront servis en priorité, moyennant un surcoût tandis que d’autres devront patienter, au risque de perte de chances pour les patients.
Le processus est déjà en marche en France. Nous sommes tributaires des producteurs des principes actifs, principalement chinois, turcs, indiens ou américains, ce qui se traduit par des pénuries, de plus en plus fréquentes et généralisées. L’exemple le plus connu est celui de l’Amoxycilline, un antibiotique pédiatrique très utilisé. Mais il y aurait près de 4000 médicaments en rupture ou en risque de rupture de stock en France, comme l’an dernier, où 30 % des Français ont connu une pénurie, ce qui devrait amener l’état à mieux réglementer ce secteur. En surveillant les stocks, d’une part, en favorisant la relocalisation des productions de médicaments, d’autre part, mais surtout en organisant la reprise en main d’une branche qui coûte « un pognon de dingue » aux Français par le biais des dépenses remboursées par la Sécurité sociale, et qui vont directement dans les poches des industriels de la pharmacie.
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