Et maintenant ?

La primaire populaire a délivré son verdict. C’est la favorite, Christiane Taubira, qui l’a emporté sans contestation, d’autant moins que d’autres candidats malgré eux, qui n’avaient rien demandé, comme Yannick Jadot, Jean-Luc Mélenchon ou Anne Hidalgo, ne voulaient pas se soumettre au résultat de la consultation. On attendra avec curiosité la prochaine vague de sondages sur les intentions de vote pour savoir si la dynamique espérée de ce processus se traduit dans les données chiffrées. Au niveau des états-majors, les lignes n’ont pas bougé et l’appel à l’union de l’ancienne garde des Sceaux n’a reçu aucun écho.

L’idée des organisateurs de cette primaire était semble-t-il de forcer la main des candidats potentiels ou déclarés pour les amener à se mettre d’accord sur une candidature unique de la gauche afin d’éviter une déroute électorale annoncée. La mobilisation a plutôt bien fonctionné avec près de 400 000 votants sur les 467 000 inscrits. Lorsque l’on fera l’analyse sociologique du corps électoral, on s’apercevra probablement qu’il s’agit d’une population plutôt urbaine, jeune, à l’aise avec les technologies, qui ne reflète pas la totalité des électorats des élections réelles et qui se revendique de la gauche, ce qui est devenu un gros mot pour beaucoup. Ce n’est pas une critique, c’est la logique même d’une consultation de ce type. S’il en était autrement, Christiane Taubira se serait présentée il y a belle lurette avec de bonnes chances de l’emporter. Désormais, il est probablement trop tard pour créer les conditions d’un accès au 2e tour pour un candidat de gauche, quel qu’il soit. Cette difficulté est présente pour tous les camps de l’échiquier politique, à l’exception d’Emmanuel Macron, apparemment assuré d’un « socle » d’environ un quart des votants, sauf énorme surprise.

Mais une élection peut en cacher une autre et tout le monde ne court pas le même lièvre. Certains visent les élections législatives et se maintiendront contre vents et marées, même sans chances réelles d’emporter les présidentielles. Il y a à la clé le financement des partis, indexé sur le nombre de députés et d’élus en général, ainsi que leur zone d’influence, voire, à terme, leur survie. Et puis il y a ceux qui jouent le coup d’après, parmi lesquels on peut ranger Éric Zemmour, dont les chances se sont nettement amenuisées pour 2022, mais qui pourrait préparer le terrain pour 2027, pour lui-même ou pour Marion Maréchal, en commençant par s’implanter localement en raflant la mise d’une extrême droite réunifiée. La menace est sérieuse, car la porosité entre la droite dite républicaine et la droite nationaliste prépare visiblement le terrain à une union des droites qui a toujours été rejetée jusqu’ici sous la 5e république, mais qui nous pend au nez, au détour d’une élection, ou pour servir des ambitions personnelles.