Pandore et le dentifrice

Depuis la parution du livre de Camille Kouchner, « familia grande », où elle dénonce l’inceste subi par son frère jumeau du fait de leur beau-père, Olivier Duhamel, les révélations se sont succédées en cascade, concernant parfois des personnalités connues comme l’acteur et réalisateur Richard Berry, ou bien des illustres inconnus. Sans rentrer dans le détail des affaires ainsi révélées, et qui, pour certaines, devront être examinées par la justice, la multiplication des témoignages prouve qu’indiscutablement une nouvelle étape dans la libération de la parole a été franchie.

L’exemple des Instituts d’études politiques, à l’image de leur maison mère plus connue sous le nom de Sciences Po à Paris, dont le directeur a été poussé à la démission, est particulièrement frappant. On en arrive à parler à Strasbourg comme Grenoble, Toulouse ou Bordeaux, d’une véritable « culture du viol ». Les abus sexuels dont ont été et sont encore victimes les étudiantes ne semblent pas une exception, mais bien une sorte de règle non écrite et généralisée dans ces antichambres du pouvoir. La frontière avec la pratique du bizutage, officiellement interdit, mais qui se perpétue sous la forme hypocrite de week-end d’intégration est suffisamment floue pour justifier toutes sortes de pratiques à connotations sexuelles. Les auteurs jouissaient jusqu’ici d’une impunité totale. Les victimes n’osaient pas porter plainte, ni même dénoncer les abus. La hiérarchie fermait les yeux.

C’est ce qui est en train de changer en ce moment. Des victimes plus anciennes, comme Tristane Banon ou Flavie Flamant, qui avaient tenté de dénoncer des faits similaires dans l’indifférence presque générale, constatent qu’elles ont précédé le mouvement, sans être véritablement entendues en leur temps. Petit à petit, les indignations successives démontrent qu’il ne sera plus possible de revenir en arrière, et que nous avons changé d’époque. Difficile de déterminer le moment clé où Pandore aurait ouvert sa célèbre boîte, libérant ainsi tous les maux de la terre. Dans notre histoire contemporaine, la parabole de l’arbre de la connaissance dans le jardin d’Éden serait peut-être plus appropriée. Ce qui est sorti de la boîte, ce n’est pas le mal, qui existait déjà, mais sa dénonciation. Tels Adam et Ève, nous savons à présent et nous ne pourrons plus feindre l’ignorance. Les mentalités évoluent rapidement, ainsi que nous pouvons le constater dans un autre domaine, assez proche, où le Garde des Sceaux semble désormais prêt à durcir les sanctions pour des actes de viols sur mineurs de 15 ans, alors qu’il y était opposé jusqu’à récemment. Et le rapport avec le dentifrice, me direz-vous ? J’y viens. Avez-vous déjà essayé de remettre dans un tube le dentifrice dont vous l’avez préalablement sorti ? Sans doute que non, tant la tâche parait impossible. Plus rien ne sera jamais comme avant, expression galvaudée, semble devoir se vérifier ici.

Commentaires  

#2 jacotte 86 11-02-2021 14:14
ce qui me gène et que personne n'a relevé dans le libelle de la nouvelle loi, c'est "toute pénétration..." pour moi il n'est pas nécessaire d'en arriver physiquement à ce stade pour qu'il y ait viol!!! cela va encore donner lieu à des "nonlieux"
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#1 Josette 11-02-2021 12:46
Les femmes dénoncent, et les hommes renoncent ? Pour qu'ils renoncent, il va s'agir de proposer des sanctions à la hauteur des actes qu'ils ont commis. Sinon, c'est comme un coup d'épée dans l'eau et la parole n'aura servi à rien, le cri aura autant d'effet qu'un chuchotement, et ça on l'a déjà connu......
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