Le couac qu’il en coûte

Je me dépêche de faire la blague avant le Canard enchaîné, à propos des déclarations du ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt. À moins que le célèbre volatile ne l’ait déjà utilisée à mon insu, car, je dois l’avouer, cela fait assez longtemps que je ne prends plus le temps de le lire in extenso. Si je me prends un « pan sur le bec », je prie mes fidèles lecteurs de m’en excuser, le jeu de mots était trop tentant.

Le ministre a annoncé tout à trac la fin du « quoi qu’il en coûte » pour 2021, alors que nombre de professions, qui étaient déjà sous perfusion, sont carrément passées au coma artificiel avec des chiffres d’affaires en berne ou voisins du néant. Citons, en vrac, les cafetiers, hôteliers ou restaurateurs, les activités culturelles et sportives, la plupart des commerces, à l’exception des grandes surfaces, j’en passe et de plus sinistrés. Évidemment, si on lit attentivement l’interview qu’il a donnée aux « échos », il apparait qu’il espère, simultanément, la fin de l’épidémie du Covid 19, mais le lien de causalité et de conditionnalité des deux évènements n’est pas clairement établi. Autrement dit, il rompt implicitement avec la promesse annoncée peut-être imprudemment par Emmanuel Macron qui était de soutenir l’économie sans limites de temps ni de montant. La doctrine gouvernementale, jusqu’ici sans failles, commencerait donc à se lézarder, même si Bruno Le Maire continue, de son côté à jouer le rôle du « good cop », en affirmant son soutien indéfectible notamment au petit commerce. Olivier Dussopt se range, lui, du côté de l’orthodoxie économique, en soulignant la nécessité de réduire la dette publique, qui atteint des sommets jusqu’alors inégalés.

J’avoue que j’ai un peu de mal à prendre au sérieux cette petite musique légèrement discordante, d’une part parce que je sais, comme tout un chacun, que si les ministres musiciens proposent, c’est le chef d’orchestre président de la République qui dispose. Et d’autre part parce que le ministre présente une certaine ressemblance avec le comédien Olivier Broche, qui, dans les Deschiens, était le souffre-douleur de ses parents, Yolande Moreau et François Morel. Avec le masque qui cache la plus grande partie du visage, l’analogie est frappante. On s’attend à tout moment à voir se déclencher la machine à baffes, contre laquelle le petit Olivier essaie de se protéger tant bien que mal à l’aide de ses mains au-dessus de la tête. On a d’autant plus de mal à envisager la fin prochaine de l’épidémie que des rumeurs persistantes annoncent un 3e reconfinement comme inéluctable. Seules diffèreraient la date, la durée et l’intensité des mesures envisagées. Comme les autres fois, les autorités nous annoncent du sang et des larmes, et si en plus, l’état ferme le robinet, le reste de moral va dégringoler en flèche.