La vue basse
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le lundi 11 janvier 2016 10:18
- Écrit par Claude Séné
C’est une expression largement passée de mode, mais assez usitée au temps de ma jeunesse, qui, je vous l’accorde, ne date pas d’hier. Elle disait pourtant bien ce qu’elle voulait dire, en associant deux caractéristiques physiques parfaitement accordées : l’air con et la vue basse. Sur ce dernier point, étant possesseur d’une myopie congénitale et conséquente, on pourrait considérer que je devrais balayer devant ma porte, mais même en m’appliquant, je doute pouvoir atteindre le niveau de ces soi-disant supporters du club de football de Saint-Étienne, qui passaient récemment en jugement pour le saccage d’un mariage dans le Beaujolais.
Tout d’abord, les faits. Une quinzaine de personnes, en combinaisons blanches, masquées, armées de barres de fer, de battes de base-ball et de matraques, se sont rendues début septembre sur le lieu où devaient se dérouler une réception et un buffet en l’honneur d’un mariage. Là, ils s’en sont donnés à cœur joie en détruisant pièces montées, les fameux croques-en-bouche si français, charcutaille, amuse-gueules, tout le contenu d’un buffet pour 300 personnes, non sans avoir saccagé le mobilier et terrorisé le personnel du traiteur, dont deux employées ont dû subir une invalidité temporaire de travail. Le tort du marié, qui était encore à l’église à ce moment-là, était considérable : c’était un traitre, un ancien supporter de l’AS Saint-Étienne, passé à l’ennemi héréditaire, l’Olympique Lyonnais, club rival et honni de ces fans historiques, au point de sombrer dans une violence aveugle.
Une dizaine de ces forcenés, originaires de toute la France, qui avaient participé à cette opération commando, comparaissaient la semaine dernière. Surprise ! C’étaient tous de gentils pères de famille, bien insérés socialement, qui s’étaient transformés le temps d’une matinée en bêtes sauvages, aveuglées par une haine imbécile, comme en plein match entre formations voisines et rivales. C’est la victime supposée qui faisait figure de « bad boy ». Membre d’un groupuscule d’extrême droite, il a été condamné en première instance pour avoir frappé une journaliste et un policier en marge d’une manifestation contre le mariage pour tous. Assaillants et agressé à mettre tous dans le même sac avant de le jeter dans la Loire ou dans le Rhône ? Peut-être pas. Le commando, en sus d’être particulièrement con en effet, s’est tout simplement trompé de mariage, justifiant pleinement le titre de cette chronique en illustrant la vue déficiente de ces imbéciles, honteux et confus, qui jurent un peu tard qu’on ne les y reprendra plus.