Bottes caoutchouc ou… derby ?

Je ne vous ferai pas l’injure de vous rappeler la différence entre ces deux chaussures, la première qui enferme pieds et jambes a pour fonction de protéger de la pluie et de la boue, la seconde est une chaussure basse de ville pour homme avec lacet le plus souvent élégante.

Laissons là pour l’instant ces définitions, j’y reviendrai plus tard.

Mon billet de ce matin c’est hélas encore un coup de gueule après la diffusion sur France 2 d’un court reportage sur le camp de réfugiés de Grande-Synthe dans la banlieue de Dunkerque. Là, 3000 migrants kurdes, dont 200 enfants venus pour la plupart d’Irak vivent dans un enfer encore pire que celui de la jungle de Calais. Établi sur un terrain marécageux, tous pataugent dans plus de 30 cm de boue, ils s’abritent dans des constructions de fortune ou dans des tentes, dans des conditions sanitaires et d’hygiène plus que déplorables : une trentaine de douches qui ne fonctionnent pas faute de réseau électrique, des monceaux de déchets et d’ordures attirant les rats s’accumulent en périphérie du camp… les voisins naviguent entre exaspération et pitié, exaspération pour les bruits et l’insalubrité, pour les demandes d’aide continuelle, et pitié devant ce spectacle de misères accumulées. La plupart de ces migrants sont des réfugiés politiques, qui fuient l’Irak. Je pensais que la France avait un programme pour accueillir cette catégorie, il faut croire que je me trompais.

Plusieurs propositions de déplacement du camp ont été faites, avec entre autres la mise en place de refuges mieux adaptés, tentes chauffées, sanitaires suffisants, le gouvernement refuse craignant la mise en place de conditions tellement confortables que l’installation deviendrait pérenne ! On rêve, quoi que… une jeune kurde de 14 ans interrogée sur ses conditions de vie, a répondu aux journalistes : « c’est difficile, mais moins qu’en Irak », alors après tout, après l’enfer de la guerre un tel camp serait peut-être le paradis.

Les journalistes qui ont traité le sujet ont été unanimes à l’appeler « le camp de la honte ». Très occupés par la mise en place de lois sur la sécurité plus ou moins pertinentes, le gouvernement comme le chef de l’État sont au-dessus de ce sentiment, ont-ils d’ailleurs le temps d’avoir des sentiments ? 

Un jour, les Guignols titillant Jacques Chirac qui prétendait être au plus près du terrain, lui demandèrent de montrer la semelle de ses chaussures. Cette dernière parfaitement propre et lisse (rien à voir avec celle des godillots d’un bouseux ou d’un ouvrier) permettait de résumer le chemin du président « tapis rouge Safrane, Safrane tapis rouge… » tout un programme !

 Aujourd’hui, aux bottes boueuses des Kurdes de Grande-Synthe, François Hollande oppose ses beaux derbys bien cirés, posés délicatement sur un tapis rouge menant à la tombe de Mitterrand dont il aimerait être l’héritier !

À chaque époque son symbole, mais toujours le même sens hélas : « Montre-moi tes chaussures je te dirai qui tu es… »

L’invitée du dimanche

Commentaires  

#3 jacott 10-01-2016 12:04
Belle conclusion jY ai pensé mais j'avais pas la place
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#2 poucette 10-01-2016 11:18
pour moi un derby était une course de chevaux ou un match de foot ...j'ai donc appris quelque chose ce matin n'ayant évidemment pas fréquenté le"beau monde"
je m'y connais plus en godasse ...et j'aurais droit au paradis s'il existait
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#1 Claude 10-01-2016 10:33
On pense aussi à la chanson de Félix Leclerc:
Moi, mes souliers ont beaucoup voyagé,
Ils m’ont porté de l’école à la guerre
J’ai traversé sur mes souliers ferrés,
Le monde et sa misère...
...Au paradis, paraît-il, mes amis,
C’est pas la place pour les souliers vernis,
Dépêchez-vous de salir vos souliers
Si vous voulez être pardonnés...
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