Soulèvements de la terre, un, Gérald Darmanin, zéro

Bien sûr, nous en sommes seulement à la première mi-temps du match qui oppose le ministre de l’Intérieur aux libertés fondamentales de ceux qui veulent s’opposer aux projets du gouvernement, qu’il a qualifiés d’éco terroristes, mais la première manche a été clairement remportée par les activistes. Le décret portant dissolution du mouvement les soulèvements de la terre, que Gérald Darmanin voulait purement et simplement interdire, a en effet été retoqué par le Conseil d’État qui a invité le ministre à revoir sa copie. En effet, les juges ont estimé que les éléments à charge présentés par le gouvernement ne sont pas suffisamment établis.

Notamment, il parait douteux que les agissements violents de quelques individus soient la conséquence de mots d’ordre explicites de cette nébuleuse, dont le fonctionnement est très différent de celui des associations, partis, syndicats, etc. Les dégradations causées par les manifestations à Sainte-Soline contre les bassines, par exemple, ne semblent pas constituer « un trouble grave à l’ordre public » aux yeux du Conseil d’État, qui en a vu d’autres, il est vrai. Ces aspects du jugement ne concernent pour l’instant que la forme du décret. Le ministre devra se contenter de l’espoir que la décision sur le fond, qui a été renvoyée à la rentrée, lui sera plus favorable, mais c’est assez mal parti. Les organisations écologistes et les partis de gauche y ont vu à juste titre un désaveu des méthodes employées, visant à faire l’amalgame entre des manifestants globalement non violents et des casseurs qui se saisissent de tout rassemblement pour essayer de pourrir les situations. Et il faut bien reconnaître que cela paye, dans une certaine mesure. Le ministre de l’Intérieur a, par fonction, un intérêt à rencontrer une forte résistance qui lui permettra de montrer sa détermination et sa fermeté.

Dans les films policiers, on voit fréquemment l’association « good cop, bad cop ». Ce rôle de méchant semble aller comme un gant à Gérald Darmanin, mais on cherche en vain celui qui pourrait tenir celui du gentil. La faute sans doute à un directeur de casting plus inspiré pour les rôles de méchants, et qui retombe inexorablement dans ses travers à chaque remaniement. Que le ministre se rassure. S’il perd la confrontation sur la dissolution des Soulèvements de la terre, le dossier Civitas semble plus solide, encore qu’il serait constitué en véritable parti politique, ce qui complique les choses. Et puis Darmanin pourrait se refaire avec la future loi sur l’immigration, qui promet d’atteindre des sommets dans la surenchère démagogique, un terrain où le ministre ne craint personne et sur lequel il compte pour affirmer une stature de candidat à la présidentielle. Mais combien seront-ils à se disputer un minuscule pré carré ?