Le bréviaire libéral
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le samedi 30 juillet 2022 11:15
- Écrit par Claude Séné
On ne peut rien comprendre aux déclarations du ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, si l’on ne les replace pas dans leur contexte de priorité au libéralisme effréné, et à la théorie du renard libre dans un poulailler autogéré. C’est ainsi qu’il s’est félicité des bénéfices record engrangés par Total énergies au second trimestre, qui lui font espérer une nouvelle année faste pour le pétrolier français. Ce qui est une bonne nouvelle pour les actionnaires, français ou étrangers, mais ne rapportera pas un centime de plus aux contribuables français, puisque le groupe n’est assujetti à aucune taxation en France grâce à des tours de passe-passe fiscaux.
Le ministre préfère visiblement laisser Total choisir le montant de sa contribution à l’effort financé en majorité par les automobilistes, qui n’ont souvent pas le choix et doivent dépenser « plein pot » le montant majoré du litre de carburant. L’hypocrisie et le cynisme sont d’ailleurs partagés. Total s’offre une campagne de publicité dont le coût est estimé à 500 millions, en baissant le prix de 20 centimes du litre, pour un temps limité. Rapporté au profit espéré de 16 ou 17 milliards en année pleine, on voit que le groupe peut se le permettre, d’autant plus que rien ne l’oblige à tenir son engagement, si ce n’est la menace d’une taxation de ces superprofits. Mais l’autre bénéficiaire de cette flambée des prix n’est autre que budget de l’état lui-même. Le ministre a beau jeu de faire le généreux avec la ristourne de 18 centimes, qui augmentera ponctuellement à la rentrée, avant de disparaître progressivement. C’est quand même lui qui bénéficie de l’augmentation du prix de vente en prélevant son pourcentage grâce à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) sans oublier la TVA.
Cette situation exceptionnelle aura eu le mérite de braquer le projecteur sur les grands groupes industriels ou commerciaux, qui font des bénéfices, mais ne paient cependant pas d’impôts en France, grâce à des artifices juridiques. Alors que les petites et moyennes entreprises paient réellement les taxes diverses auxquelles elles sont assujetties, à hauteur d’environ 25 % de leurs bénéfices, les grandes entreprises ne paient en moyenne que 18 %, voire rien du tout dans certains cas. C’est une injustice flagrante qui pénalise les PME, et qui fait perdre à l’état français une part non négligeable de ses ressources. Bruno Le Maire, en phase absolue avec le président Macron, ne souhaite que la baisse ou la disparition des impôts existants. C’est faire fi des besoins réels du pays, et de la situation catastrophique de nombreux secteurs relevant de l’action de l’état, que ce soit l’éducation, la culture, le soin et notamment les urgences, la justice et un maintien de l’ordre citoyen, sans oublier l’écologie et tous les défis qui nous attendent. Ni la Providence ni la religion libérale n’y pourvoiront.