Les soirées de l’ambassadeur

Le président s’est contenté d’une simple allusion dans son discours concernant la situation en Afghanistan. Et pourtant le rôle de l’ambassadeur de France à Kaboul est absolument primordial pour assurer la sécurité de nos concitoyens bloqués dans la capitale après la reprise du pouvoir par les talibans, ainsi que celle des Afghans qui nous ont aidés pendant toutes ces années. L’ambassade a d’ailleurs dû être délocalisée à l’aéroport, qui reste pour l’instant sous la protection et l’autorité des forces de la coalition, afin d’organiser l’évacuation de nos ressortissants. On imagine que les soirées de l’ambassadeur lui semblent en ce moment trop courtes pour faire front à la difficulté de la tâche.

Cet ambassadeur n’est pas un inconnu pour ceux qui suivent la politique dans notre pays depuis un certain temps. Il s’agit de David Martinon, un temps conseiller de Nicolas Sarkozy, qui en avait fait son souffre-douleur favori, et porte-parole de la présidence de la République entre 2007 et 2008. Malgré ses critiques récurrentes sur le manque de maturité de son poulain, le président Sarkozy le parachute dans son fief de Neuilly-sur-Seine pour les élections municipales. Sur sa liste figure un certain Jean Sarkozy, surnommé le prince Jean par le Canard enchaîné qui y voit une tentation de monarchie héréditaire. Le fils du président commencera par apporter son soutien indéfectible au candidat de son parti et de son père, en déclarant : « on te soutiendra à mort, David », avant de retourner sa veste en faveur d’un outsider dissident de sa famille politique. Bon petit soldat, David Martinon retirera sa candidature à la mairie de Neuilly-sur-Seine et proposera sa démission du poste de porte-parole. Il sera nommé consul de France à Los Angeles, puis à l’ONU, avant de devenir ambassadeur de France à Kaboul en septembre 2018.

C’est là que nous le retrouvons, grâce à un reportage de la télévision française, et où nous comprenons que ce poste est loin d’être une sinécure. L’ambassadeur ne se déplace que le moins possible, sur prescription d’un service de sécurité conséquent, et doit porter gilet pare-balle et casque lourd pour prévenir toute tentative d’attentat. Il dispose d’un bunker de fonction où il doit se mettre à l’abri à la moindre menace. On est loin de l’image d’Épinal des soirées de gala où le champagne coule à flots sur les chocolats d’une célèbre marque qui vante ses produits avec un slogan flatteur : « vous nous avez gâtés, Monsieur l’Ambassadeur ». Je dois reconnaître que ce diplomate, dont je ne partage aucune des convictions et surtout pas son libéralisme viscéral, m’a épaté par un courage physique que je ne soupçonnais pas. Il a ainsi gagné, sinon ma sympathie, du moins le respect pour le travail qu’il effectue. Il fait partie de ce corps de hauts fonctionnaires prêt à servir l’état, sans condition d’accord politique sur les orientations. Sera-t-il agréé par le nouveau pouvoir taliban ? La question est ouverte.

Commentaires  

#1 massé 17-08-2021 11:54
il y a des récompenses qui valent des punitions!!
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