Désaccord mutuel

Le Premier ministre britannique, Boris Johnson, s’est déclaré très pessimiste sur la possibilité de parvenir à un accord avec l’Union européenne pour régir les relations de la Grande-Bretagne avec l’Europe dont elle ne fait plus partie depuis quatre ans et demi. À l’épreuve des faits, on peut se demander s’il a vraiment escompté un compromis de dernière minute, obtenu à l’arraché grâce à la désunion des partenaires européens, ou si toute sa stratégie n’a pas consisté à préparer son opinion publique à faire porter le poids de l’échec sur la communauté européenne.

Un accord est d’autant moins possible que Boris Johnson semble penser qu’il a plus à gagner dans une position intransigeante sur les points de désaccord, en démontrant à son opposition qu’il est le meilleur défenseur des intérêts de son pays, qu’en acceptant un compromis, aussi avantageux qu’il puisse apparaitre, qui impliquerait une ou plusieurs concessions en monnaie d’échange. La position de Boris Johnson vis-à-vis du Brexit a pu paraître erratique. Après l’avoir combattu dans un premier temps, il s’est rallié à cette sortie du Royaume-Uni dans un but clairement opportuniste, afin de se trouver dans le camp des vainqueurs au référendum et en tirer tous les avantages personnels possibles. Il faut lui reconnaitre un flair politique, à défaut de convictions, qui lui a permis de se propulser au poste qu’il convoitait depuis longtemps au 10 Downing Street. Toute son énergie est désormais tournée vers un objectif simple : s’y maintenir à tout prix.

Sa survie au poste de Premier ministre est conditionnée par une image de défense intransigeante de la souveraineté britannique. Toute la campagne du Brexit a été axée sur le rejet des « diktats » européens qui feraient bon marché de l’indépendance nationale. Tout ce qui pourrait ressembler de près ou de loin à une ingérence dans les affaires intérieures du pays est donc brandi comme un repoussoir et empêche Boris Johnson ou n’importe quel dirigeant à son poste de tomber d’accord avec la commission, au prix de pertes mutuelles considérables. Mais il ne sera pas dit que la Couronne a cédé le moindre pouce de terrain. Après des années de négociations infructueuses, Boris Johnson devait sceller la rupture par désaccord mutuel en donnant l’impression d’une bonne volonté de sa part. C’est pourquoi il a fait le déplacement et a rendu visite en personne à la présidente Ursula Von der Leyen pour pouvoir dire qu’elle a refusé la main tendue. Si, par miracle, les prétentions du Royaume-Uni d’avoir comme toujours le beurre et l’argent du beurre étaient acceptées, ce serait évidemment tout bénéfice, et le Premier ministre pourrait rentrer de Bruxelles en triomphateur après une Blitzkrieg autour d’un repas de coquilles Saint-Jacques pêchées dans les eaux européennes.

Commentaires  

#1 jacotte 86 12-12-2020 11:44
4 ans et demi déjà !on dirait que c'était lier... le tems passe vite quand les préoccupations nous échappent un peu
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