Messieurs, et chers administrés…
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le mercredi 18 décembre 2019 10:58
- Écrit par Claude Séné
J’imagine l’embarras de l’ancien cadre des ressources humaines du groupe Auchan, actuellement député du Nord sous l’étiquette LREM, nouvellement nommé secrétaire d’État en charge des retraites en remplacement de Jean-Paul Delevoye, contraint à la démission. Comme le célèbre sous-préfet imaginé par Alphonse Daudet dans les lettres de mon moulin, il va devoir défendre un projet par un discours dont il ne maîtrise que l’entame, et dont il n’a pas la moindre idée, pas plus que quiconque, de ce qu’il en adviendra.
Laurent Pietraszewski intègre un gouvernement fragilisé par le 16e départ ministériel du quinquennat sur un dossier où tout le monde perd son latin et attend de voir ce qu’il ressortira d’un conflit marqué par l’entêtement de l’exécutif, prêt à sacrifier les fêtes des Français plutôt que d’accepter de négocier. Pour préserver un pseudo équilibre financier, Macron sera sans doute amené à dépenser des milliards pour calmer les colères catégorielles comme il a déjà été obligé de le faire pour les militaires ou les policiers. Concernant le nouveau ministre, j’ai de très grandes inquiétudes sur sa prochaine déclaration d’intérêts : s’il a fallu 2 ans pour s’apercevoir que Mr Delevoye n’était pas en règle, j’ai peine à croire qu’en 2 jours la situation de son successeur ait pu être vérifiée convenablement.
On hésite d’ailleurs sur la façon dont il faut apprécier la situation de l’ancien ministre. Sauf l’exception du départ fracassant de Nicolas Hulot, démissionnant sur le constat d’un désaccord de fond, les démissions sont généralement sollicitées. Je doute que Jean-Paul Delevoye ait été brusquement touché par la grâce et convaincu qu’il ne pouvait pas cumuler toutes ces fonctions, rémunérées ou non. Après tout, le pouvoir savait bien qu’il était rémunéré pour ses activités dès 2017, quand il n’était encore que Haut-commissaire. Et s’il ne le savait pas, c’est une faute, un trou dans la raquette. Il y a quelque chose d’indécent et de profondément hypocrite dans le fait d’accepter cette démission « avec regret ». Comme si le regret portait sur le fait d’avoir été découvert et non dans le manquement à ses obligations constitutionnelles. Personnellement, je ne regretterai pas un ministre viscéralement de droite, qui a, sciemment, enfreint les règles de la République, pas plus qu’en son temps un Cahuzac, ministre délinquant et jugé comme tel.
Jean-Paul Delevoye n’aura pas bénéficié de la clémence d’Auguste, je veux dire d’Emmanuel, comme Alexandre Benalla dont le président a trop tardé à se séparer, ce qui lui a coûté cher en termes d’image. La leçon valait-elle un fromage ? Cette fois, le Roi a sacrifié sa tour sans tergiverser, mais pourra-t-il pour autant éviter l’échec ?