Monsieur le Président,

Je vous fais une lettre, mais ne vous rassurez pas, je n’ai nulle intention de déserter et je compte bien continuer à chroniquer ma vie quotidienne, loin des fastes et des ors de la République dont semblez aimer user et abuser. Quand Boris Vian s’adressait en 1954 à votre prédécesseur, René Coty, pour l’inciter à arrêter les massacres coloniaux, l’abbé Pierre tirait la sonnette d’alarme et en appelait à la solidarité nationale. Quelques années plus tard, Jean Ferrat rendait hommage à l’auteur du Déserteur dans la chanson Pauvre Boris où il constatait que rien n’avait vraiment changé.

On peut malheureusement renouveler ce constat aujourd’hui. Alors, plutôt que de formuler des vœux pour les Français, une fois n’est pas coutume, je me propose d’énoncer les souhaits des Français à l’égard de leur président. S’il vous plait, Monsieur le Président, ne vous acharnez pas. Quand un chef d’État est contraint de prendre une semaine de vacances pour réfléchir à ce qu’il pourrait bien raconter au peuple pour lui rendre le moral perdu et réparer les premiers mois gâchés d’un quinquennat déjà interminable, c’est que la situation de ses administrés est fort préoccupante. Le symptôme le plus visible en est cette éruption de gilets jaunes qui envahit le pays et dont certains pensent qu’elle défigure la nation. Vous avez réussi en peu de temps à vous attirer la détestation des Français, dont beaucoup vous vouent une véritable haine, alors qu’en toute honnêteté vous ne méritez ni cet excès d’honneur ni cette indignité. Mais le fait est là. Plus des trois quarts de vos concitoyens jugent négativement votre action et plus encore votre personne. En 2019, le meilleur service que vous pourriez rendre au peuple serait de le consulter sur votre destin personnel.

Songez que vous êtes encore très jeune et qu’un avenir prometteur vous attendait chez Rothschild, où vos qualités de technocrate pouvaient trouver pleinement à s’épanouir. Ou alors, si vous préférez une carrière plus créative, pourquoi ne pas revenir à vos premières amours ? Faites du théâtre, écrivez des poèmes, rédigez un traité d’économie, un roman, que sais-je ? Ce ne sont pas les idées qui manquent. Vous rendrez un grand service à votre pays en le laissant choisir sa voie, et à vous-même en explorant les dons variés qui sont en vous, à n’en pas douter. Je ne saurais trop vous conseiller, Monsieur le Président, de méditer sur le destin d’Édouard VIII, ce roi d’Angleterre qui abdiqua par amour et épousa Wallis Simpson avec laquelle il coula des jours heureux, et comparez-le à celui de sa gracieuse majesté Élisabeth II qui a enchaîné annus horribilis sur annus horribilis. Au nom des Français, je vous conjure de faire de 2019 l’année la plus lucide de votre existence. Respectueusement vôtre.

 

Commentaires  

#2 roy suzanne 31-12-2018 11:51
bonne année et surtout bonne plume pour me régaler chaque matin bise Poucette
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#1 jacotte86 31-12-2018 11:28
qu'il vous entende mon fils.. qu'il vous entende
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