Un peuple d’élite, sûr de lui et dominateur

Il fallait être au moins le général de Gaulle, encore auréolé de son image de grand résistant à l’oppression nazie et fort de son statut d’homme providentiel pour oser critiquer aussi ouvertement en 1967 la politique menée par Israël, au risque d’être taxé d’antisémitisme. Son passé parlant pour lui, il pouvait se permettre de donner son sentiment sans être accusé de proférer des paroles racistes à l’égard de toute une communauté à raison de ses convictions religieuses.

Le président israélien et son gouvernement ne s’embarrassent pas de précautions oratoires après le vote de la résolution 2334 du conseil de sécurité, rendu possible par l’abstention des États-Unis, qui condamne la politique de poursuite des implantations de colonies israéliennes dans les territoires occupés. Selon Benyamin Nétanyahou, le texte des Nations Unies est « insignifiant, absurde, biaisé et honteux » et manifestement anti-israélien, alors que son pays serait la seule démocratie du Proche-Orient. En conséquence de quoi, il ne s’y conformera pas et attendra que Donald Trump, qu’il a soutenu ouvertement, prenne ses fonctions pour renverser la position américaine. Mieux encore, alors que la résolution 2334 ne prévoit aucune sanction, Israël annonce des « punitions » et a déjà décidé de réduire sa participation financière aux programmes de l’ONU.

Dans le même esprit, Israël condamne par avance la tenue d’une conférence le 15 janvier à Paris, destinée à promouvoir une solution pacifique au conflit en instaurant le principe de deux états. Le ministre de la Défense, Avigdor Lieberman, représentant de l’extrême droite nationaliste, n’a pas hésité à qualifier cette conférence de nouvelle affaire Dreyfus, et a exhorté les juifs de France à quitter le pays pour rejoindre Israël. On peut se demander pourquoi les dirigeants israéliens réagissent de façon aussi brutale et épidermique à toute tentative de règlement du conflit par la voie d’une concertation internationale, quelle que soit sa forme. Depuis que l’État d’Israël a été créé, il n’a cessé d’être en butte à des résolutions dont il n’a jamais tenu le moindre compte. À chaque fois qu’il a considéré sa sécurité ou ses intérêts menacés, il a forcé son destin, menant des guerres « préventives ». Pas plus que Wladimir Poutine, Israël n’a attendu le feu vert de la communauté internationale pour décider unilatéralement de son destin. Et ce n’est pas le prochain président des États-Unis qui lui créera des difficultés. Alors ? Tout se passe comme si Israël, non content d’être le plus fort, voulait aussi être le plus aimé, qu’on lui reconnaisse pour l’éternité le statut de nation martyre et que toutes ses décisions soient légitimées au nom des souffrances passées, des persécutions et de la Shoah. Mais peut-on tout avoir ?