Justiciables

L’actualité judiciaire est encore riche cette semaine. C’est l’occasion de mesurer le chemin parcouru depuis que ce bon Monsieur de La Fontaine écrivait « les animaux malades de la peste ». À cette époque reculée, bien avant les Lumières, en fonction de sa condition sociale on n’était pas traité de la même façon par la justice. Ce que résumait, ma foi fort bien, la morale destinée à édifier le petit peuple : « selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir ».

Heureusement, cette époque est révolue et la justice moderne rend ses arrêts dans la plus parfaite impartialité sans tenir le moindre compte de la qualité des personnes mises en cause. C’est ainsi que j’attends sans aucune inquiétude le jugement de la Cour de justice de la république qui doit rendre son verdict lundi dans l’affaire de l’indemnisation injustifiée de Bernard Tapie. Le procureur n’a rien trouvé à reprocher à Christine Lagarde, alors ministre en charge du dossier et a demandé sa relaxe. Je pense qu’elle serait en droit de demander des dommages et intérêts, et le remboursement de ses frais d’avocat dont la plaidoirie est manifestement inutile devant le zèle du ministère public à absoudre une personnalité aussi influente que l’actuelle directrice du FMI. Ah ! évidemment, c’est autre chose que des fauteurs de trouble tels que les frères d’Adama Traoré qui ont le culot insigne de protester après sa mort dans des conditions suspectes. Ils sont loin d’avoir la classe et l’aura de Mme Lagarde. Il leur faut des condamnations à de la prison ferme, même si les éléments d’identification n’ont pas été parfaitement probants. Ce procureur n’a pas les états d’âme de son confrère et requiert avec acharnement. Il sera donc logiquement suivi par la cour.

Dernière affaire, tout en nuance, cette fois, avec un jugement qui ne satisfait personne. Des policiers accusés de violence lors d’une manifestation au cours de laquelle 6 personnes ont été blessées par des tirs de Flash-Ball, dont une a perdu un œil. Les faits sont établis, la question est de savoir s’il y a eu légitime défense. Généralement, le simple fait d’être assermenté suffit à établir le bon droit des policiers. Miraculeusement, la Cour considère que la riposte ne répond pas aux critères de tirs justifiés, nécessaires et proportionnels et condamne par conséquent les policiers… à du sursis ! cherchez l’erreur. Par ailleurs, les policiers ne doivent pas porter d’arme pendant un an, une sanction incompréhensible : c’est trop, ou trop peu, et ils encourent des poursuites disciplinaires, ce qui est bien le moins et ne devrait pas être subordonné à une décision de justice. La leçon vaudrait bien une fable, sans doute, et je regrette de ne pas avoir le talent de Jean de La Fontaine.