L’ordre public
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 25 novembre 2016 10:18
- Écrit par Claude Séné
Il ne doit être troublé à aucun prix. C’est au nom de cette notion que l’on justifie l’arbitraire le plus absolu et la violence de l’autorité publique contre les simples citoyens. Depuis la mort d’Adama Traoré dans la gendarmerie de Persan–Beaumont-sur-Oise dans des conditions encore non élucidées 4 mois après les faits, la situation n’a cessé de se dégrader, alors que sa famille attend toujours le moindre geste de condoléances ou de soutien de la part des autorités, qu’elles soient locales ou nationales. Ce mépris des familles et de la population de Beaumont est la cause directe de l’escalade de violence des jours derniers.
L’instruction de l’affaire est lente et a paru partiale. Pour la famille, elle nécessiterait la mise en examen des gendarmes ayant procédé à l’interpellation inutilement musclée d’Adama Traoré qui a abouti à sa mort, pour homicide involontaire et non-assistance à personne en danger. La famille a le sentiment que les gendarmes cachent la vérité, par esprit de corps, et que la maire de la ville s’est rangée de leur côté. C’est d’ailleurs ce qui a mis le feu aux poudres, quand Nathalie Groux, maire UDI de la ville, a demandé au conseil municipal de prendre en charge financièrement sa plainte en diffamation contre la sœur de la victime, qui lui reprochait d’être solidaire des gendarmes. Grave trouble à l’ordre public en effet. Disputes, invectives, affrontements entre manifestants et forces de l’ordre. Deux des frères d’Adama Traoré interpellés et incarcérés. Plusieurs nuits de violence, des véhicules incendiés par des jeunes n’ayant aucun lien avec la famille Traoré. La situation a dégénéré et ressemble à celles qui ont déjà abouti dans le passé à des émeutes urbaines.
On voit par là comment une violence institutionnelle peut conduire à un trouble réel à l’ordre public, faute d’un traitement équitable des citoyens, la prise en considération du préjudice qu’ils ont subi et le nécessaire respect de leur dignité. Que le travail des gendarmes ou des policiers soit difficile n’est pas contestable, mais c’est une autre question, comme celle des sanctions administratives ou judiciaires qui s’imposeront s’il y a eu manquement. Cela n’empêche en rien les autorités compétentes de prendre en compte les frustrations légitimes de la population et de lui témoigner un minimum de compassion. Au lieu de quoi, le ministre de l’Intérieur manifeste sa solidarité avec les forces de l’ordre, sans un mot pour la victime, et les deux frères d’Adama Traoré restent en détention provisoire jusqu’à leur comparution. Croit-on vraiment que cette décision soit de nature à calmer le jeu et à restaurer ce fameux ordre public ?