Les frères ennemis
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- Catégorie : Diabloguiste
- Publié le vendredi 18 novembre 2016 10:34
- Écrit par Claude Séné
C’était hier le dernier débat entre les concurrents de la droite et du centre avant le premier tour de la primaire qui doit les départager. Je ne lis pas plus que vous dans le marc de café et l’élection surprise de Donald Trump aux États-Unis doit inciter tous les observateurs à une certaine prudence. Il semble quand même que le match se joue entre les trois favoris, Juppé, Sarkozy et Fillon. Ce qui veut dire que Bruno Le Maire, notamment, n'a pas réussi la percée espérée, alors qu’il a bâti toute sa stratégie sur l’idée de renouveau.
De l’aveu même du candidat, il n’a pas été très bon dans l’exercice particulier du débat télévisé, mais c’est surtout, apparemment, le concept de renouvellement qui a eu du mal à s’imposer. Difficile de se représenter la révolution sous les traits lisses et le parcours sans faute d’un premier de la classe, dont la transgression la plus folle consiste à se passer de cravate, avant de la remettre frileusement au premier frémissement des sondages. Quand on creuse un peu, on s’aperçoit que ses propositions ne diffèrent pas fondamentalement de celles de ses concurrents, qui optent tous pour un libéralisme bon teint. D’ailleurs, son passage au gouvernement n’a pas été marqué par des mesures révolutionnaires, que ce soit aux Affaires européennes ou à l’Agriculture. Bruno Le Maire a été le bon petit soldat de la ligne politique imprimée par ceux qu’il critique aujourd’hui pour leur frilosité, Nicolas Sarkozy et François Fillon. Tout bien pesé, au fond, le seul argument réel de ce soi-disant renouveau, c’est son âge. Comparé aux 71 ans d’Alain Jupé, c’est un minot avec ses 47 ans. Mais si la modernité ne tenait qu’à l’âge, ça se saurait. Et l’on sait bien qu’il y a des jeunes plus ringards que leurs aînés.
Le parallèle avec Emmanuel Macron est frappant. Lui aussi a choisi le créneau du renouvellement. Lui aussi est issu du sérail. Lui aussi est passé par l’ENA. Lui aussi est attiré par la littérature, même s’il a échoué au concours de l’école normale supérieure que Bruno Le Maire a réussi. Lui aussi a été ministre. Lui aussi a une tête de premier communiant et joue de son image. « Il venait d’avoir 38 ans, c’était le plus bel argument de sa victoire » aurait pu chanter Dalida. Il nous a fait le coup de « l’annonce faite à Marianne », en se présentant comme le Messie. Reste à voir si la mayonnaise prendra, ce dont je doute. Les Français pourraient être tentés d’en finir définitivement avec « Manu Bellegueule », et ce n’est pas moi qui les en blâmerais.